ARBOIS
« Une gestion collective du matériel au service de la performance de chacun »

La viticulture biologique s'est fortement développée ces dernières années dans le Jura et aujourd'hui près de 80 vignerons conduisent leurs domaines selon ce mode de production, soit près d'un quart des surfaces des AOC vins du Jura. La journée technique viticulture bio organisée par la chambre d'agriculture et la société de Viticulture du Jura s'est déroulée cette année au domaine de la Touraize à Arbois chez André-Jean et Héléana Morin.
« Une gestion collective du matériel au service de la performance de chacun »

En 1985, André-Jean Morin rejoint son père et comme lui, devient coopérateur en débutant avec 30 ares de vigne. Petit à petit, il développe le domaine pour arriver à 15 ha. En 2009, il décide de vinifier lui-même et quitte alors la coopérative. Il vend 3 hectares de vigne pour financer une partie de son projet, dont la construction d'une cuverie en 2011, d'un chai en 2014 et d'un espace dégustation en 2015. En 2016, son épouse Héléana rejoint le domaine et ils font le choix de débuter la conversion en agriculture biologique. Et depuis 2018, la conversion à la biodynamie est démarrée. Dorénavant, le domaine cultive 13 hectares de vignes composés de tous les cépages jurassiens : chardonnay, savagnin, ploussard, trousseau et pinot noir. Le principal avantage du domaine est son parcellaire situé à moins d'1 km autour du bâtiment.

 

Visite des caves


Depuis la conversion bio, André-Jean n'a pas constaté de baisse de rendement (mises à part celles dues aux aléas climatiques). En moyenne, une récolte lui apporte 48 hL/ha. Les vendanges sont manuelles, avec un tri réalisé au moment de la récolte. Les fermentations se déclenchent grâce aux levures indigènes et se déroulent ensuite sans chaptalisation ni intrants. Le So2 est utilisé en faible quantité avant fermentation. Puis, un deuxième apport de So2 peut être fait pour stabiliser l'acidité volatile. Les vins ne sont pas filtrés, hormis pour les vins oxydatifs et les macvin.

 

 

Tour de parcelles


L'enjambeur, en démonstration sur la parcelle de la Touraize (photo ci-contre) a pour avantage de travailler avec une bonne stabilité : il suit le terrain, le porte-outil corrige le dévers, ce qui facilite le travail sous le rang. Pour un bon travail avec les lames, il faut compter avancer à 2 km/h.
La visite se poursuit alors sur le lieu-dit en Curoulet. Les 3 hectares de l'ilôt sont plantés en Chardonnay (terrain plutôt calcaire), en Poulsard (terre marneuse), et en Savagnin.
La parcelle de Savagnin, plantée en 1991, subit beaucoup de cas de mortalité dû notamment à l'esca. Les forts rendements de 1996 n'ont pas permis un bon enracinement des ceps. André-Jean estime que cette mauvaise implantation est à l'origine de cette sensibilité à l'esca.
En face de cette parcelle se trouve une plantation de Poulsard de 1 et 2 ans sur une terre forte, marneuse, la vigne mettra plus de temps à s'installer. Sur cette parcelle, André-Jean envisage de mettre en place des engrais verts. Une discussion s'en suit sur les engrais verts, avec les pour et les contre sur ce système d'enherbement hivernal.


La Cuma des Bodines


La visite se poursuit à la Cuma des Bodines - sortie d'Arbois direction Dole. En 1994, la Cuma est créée par 4 personnes dont André-Jean Morin. En 2019, elle réunit 19 viticulteurs pour une surface de 80 ha de vignes. En 2016, un bâtiment de 800 m2 a été construit à côté du hangar initial, financé en grande partie par les panneaux photovoltaïques qu'il héberge sur son toit. Avec ce grand espace, une partie a pu être mise en privatif afin que les cumistes puissent y entreposer une partie de leur matériel privé.
Le principe d'une CUMA est de mutualiser le matériel viticole nécessaire pour l'entretien des vignes comme des tracteurs, des enjambeurs, des rogneuses, des pulvérisateurs pour les traitements, différents outils pour le travail du sol, etc.... Tous les lundis matins, les cumistes se réunissent afin d'établir le planning de la semaine à venir sur les différents engins. Lorsqu'un cumiste s'engage pour l'utilisation d'un engin, il s'engage pour un nombre d'heures (un prix est fixé à l'heure d'utilisation). S'il ne les fait pas, il doit payer le nombre d'heures d'engagement (moins le carburant). Dans cet esprit collectif, les casses sont également mutualisées : le coût de la réparation n'est pas supporté seulement par la personne « responsable » de la casse, ils prennent en compte l'usure de l'engin qui a pu engendrer la casse et le coût est donc réparti proportionnellement au nombre d'heures d'utilisation. Le côté humain est très important au sein de la Cuma, cela fonctionne « comme un couple », avec des hauts et des bas, des désaccords, des compromis.
Ce système de mutualisation permet d'investir dans du matériel plus performant. Avec la totalité de son matériel viticole en Cuma, André-Jean paye une facture de 2000 €/ha/an en moyenne. Cela comprend tout ce qui est lié à la mécanisation : achat, entretien, amortissement, carburant, assurances etc...