LAMOURA
Comment faire évoluer le Gaec ?

Le Gaec n'a jamais été statique. Il a toujours su répondre aux évolutions de l'agriculture, tant économiques que sociétales. Aussi, se pose la question d'une évolution des Gaec, dans un contexte économique marqué par une instabilité chronique qui n'épargne aucune production mais aussi par l'ouverture de nouvelles opportunités à saisir et pour lesquelles les sociétés ne sont pas toujours adaptées. A Lamoura, dans le Jura, les participants au congrès Gaec et Sociétés ont travaillé sur cette nécessaire évolution.
Comment faire évoluer le Gaec ?

La conjoncture économique évolue et se durcit. Elle demande plus de compétitivité, plus de compétences et de performances. Mais l'agriculture qui reste une activité d'avenir, ne propose plus de perspectives économiques claires. Difficile aujourd'hui de se projeter dans le temps pour des activités qui impliquent de raisonner sur des cycles longs ! Le Gaec permet de mieux affronter ces incertitudes. Mais celles-ci peuvent aussi provoquer des tiraillements entre les associés sur les orientations de l'entreprise...

Dans le même temps, de nouvelles opportuinités émergent. A chaque fois, il a fallu adapter les entreprises, et notamment les sociétés et leurs réglementations, à ces développements, avec souvent des retards et des blocages réglementaires. Aujourd'hui l'économie numérique et même les prémices d'une certaine « ubérisation » font leur entrée dans les exploitations. C'est l'exemple des plates formes de mise en relation pour la location de matériel. Les sociétés et en particulier les Gaec peuvent être bloqués dans ces évolutions, avec le risque de rester en marge. Si toutes les activités ne sont pas envisageables en Gaec, les freins posés par leur réglementation doivent être justifiables. Et trouver les réponses est fondamental pour que les agriculteurs puissent saisir ces nouvelles opportunités.
Dans le même temps, l'agriculture est soumise à des pressions sociétales de plus en plus fortes. Les agriculteurs souhaitent alors des cadres juridiques adaptés au développement de leur projet et qui leur permette de travailler dans de bonnes conditions et d'avoir un mode de vie comparable à celui d'autres professions. Ces attentes ne sont pas nouvelles mais elles s'accentuent et s'expriment aujourd'hui de manière plus active. Un travail doit alors être mené sur la compatibilité des formats actuels de l'installation avec ces besoins d'indépendance, d'autonomie, de réversibilté exprimés par les nouvelles générations.

 

Des pistes d'évolution

 

Soucieuse d'assumer clairement leur rôle de représentation des agriculteurs groupés, les instances de Gaec et Sociétés se sont interrogées sur d'éventuelles évolutions des critères d'agrément... On a ainsi parlé de création d'un lien plus direct avec les Gaec, de renforcement du réseau, de représentations et de reconnaissance dans les instances décisionnaires, de préparation de la renégociation de la transparence Gaec dans le cadre de la prochaine Pac, de reconstruction de relations avec le ministère de l'Agriculture...
Face à l'urgence, il est également question de mettre en place un moratoire sur les reprises d'agrément qui toucheraient des Gaec en dépassement d'objet, pour des sommes ne dépassant pas certains seuils. L'association aura besoin d'une année pour, soit trouver une solution réglementaire validant ces pratiques, soit initialiser un processus d'externalisation ou transformation du groupement, à mettre en oeuvre l'année suivante...

 

L'agriculture modulaire

 

L'agriculture modulaire est en plein essor. Des structures d'exploitations sont créées et consacrées à des productions différentes ou à des phases spécifiques d'un même processus de production. Depuis longtemps, des éleveurs créent des sociétés d'engraissement ou de naissage afin de mieux maîtriser leurs productions et la valorisation de leurs produits.
On constate que des Gaec participent au capital de SCEA (maternités collectives, structures d'engraissement...), voire à des coopératives dont certaines conduisent, de manière très secondaire, une ou plusieurs exploitations agricoles. Ces participations posent questions au regard de la définition des Gaec partiels et de l'interdiction de concurrence. Un Gaec participant à une société d'exploitation agricole deviendrait partiel et perdrait donc la transparence économique. Les activités partiquées dans ces deux structures ne doivent pas être identiques sinon l'agrément est perdu... Il semblerait que les services du ministère soient prêts à revoir ce point, sur des aspects que Gaec et Sociétés considère néanmoins comme insuffisants. Les réflexions devront se préciser et être mises en perspective de l'évolution des Gaec et de l'économie agricole.

 

Un droit à l'essai

 

Le président Gilles Brenon et son équipe travaillent depuis 2017 sur la question du Gaec à l'essai. Un projet de « droit à l'essai ». Ils souhaitent répondre aux besoins qu'ont les associés de se tester, d'expérimenter le travail en commun au quotidien et la nécessaire flexibilité dont il faut faire preuve pour celà. Il s'agit, sur une période donnée, de travailler en situation d'association sans pour autant avoir formalisé la société. Une période qui permet de tester la bonne entente entre les futurs associés, de consolider le projet collectif et de mettre en place les bases d'un fonctionnement d'équipe avec le réglement intérieur. L'accompagnement des associés par un formateur spécialisé sur ces questions, est indissociable de ce temps d'essai.
« Le travail effectué depuis plusieurs années sur l'accompagnement humain est très positif, a conclu Gilles Brenon. Mais nous ne savons pas le faire savoir. Notre discours n'est pas assez offensif ! Nous sommes fiers de nos productions, de la diversité agricole, de la qualité de notre travail, de ce que nous faisons de nos territoires, de la dimension humaine importante de nos groupes, du partage des bénéfices mais aussi des pertes, de la rentabilité souvent mieux assurée de nos exploitations... Il faut le faire savoir, notamment auprès des futures générations d'agriculteurs... »