ASSOCIATION DES MAIRES
Le rural est l'avenir de l'urbain

Pour sa dernière intervention à la présidence de l'association des maires du Jura, Sylvie Vermeillet a montré la différence de traitement de l'Etat entre urbains et ruraux. Elle revendique l'égalité de moyens pour préserver l'avenir de territoires ruraux que, dans une société durable, elle considère comme l'avenir de l'urbain.
Le rural est l'avenir de l'urbain

S'il est un message que Sylvie Vermeillet a voulu reprendre pour sa dernière présidence à la tribune de l'association des maires du Jura, c'est bien celui de l'offensive. Pas une offensive de désespoir, mais une offensive de raison : «une offensive pour préserver nos droits à vivre dans le Jura.»

«Sommes-nous des citoyens égaux aux Parisiens ou aux Lyonnais ? s'inquiète la présidente en évoquant la « providentielle loi Alur qui n'a d'allure que le nom... Y a-t-il dans cette loi un seul signe d'encouragement à venir s'installer dans un département rural ? Pourquoi la dotation des communes de moins de 100 habitants est-elle de 64 euros par habitant et celle des communes de plus de 500 000 habitants des 129 euros par habitant ? Pourquoi la dotation par habitant des EPCI à fiscalité additionnelle est-elle de 20 euros et celle des communautés urbaines et métropoles à 60 : le triple ?»
Et de commenter : «Le pire c'est que plus l'Etat concentre les moyens, plus il s'enlise dans les problèmes de concentration : surpopulation, manque de logements, précarité, délinquance... Verser trois fois plus ne suffit pas à rendre les grandes villes plus habitables ! Je crois donc que l'Etat visionnaire devrait au contraire tout faire pour éviter l'hyper métropolisation afin de garder sa souveraineté en tous lieux. Ils débraient encourager les populations à vivre dans les territoires ruraux pour s'exonérer d'avoir à subir de graves fléaux urbains dans quelques années. Il devrait inverser la tendance actuelle au lieu de la soutenir. Revendiquons l'égalité de moyens pour préparer et maîtriser les décennies qui arrivent car dépouiller le rural aujourd'hui condamne l'avenir de tous... Le rural est l'avenir de l'urbain. Il m'importe de quitter la présidence de l'AMJ avec ce seul message

 

Des compétences mais pas de ressources


La période de vote des budgets a été complexe pour les maires qui ont touché du doigt ce phénomène qu'est la raréfaction de leurs ressources. Phénomène d'autant plus sensible que le choix avait été fait par la plupart de ne pas accentuer la pression fiscale - aussi bien pour les particuliers que pour les entreprises – et que la réduction des dotations de l'Etat était effective : moins 3,7 milliards en 2015, moins 11 milliards sur trois ans... Certes, chacun pense qu'il est nécessaire que les collectivités contribuent à un effort de maîtrise et même de réduction de la dépense publique. «Mais elles ne doivent pas constituer la principale économie nette au budget de l'Etat comme cela semble être le cas pour 2015, peste Jean-Louis Maître, le secrétaire général, dans son rapport d'activités. Nous ne pouvons pas admettre que la Cour des comptes dans son dernier rapport, mette encore en accusation les collectivités territoriales alors que les règles budgétaires et comptables qui régissent nos comptes sont bien plus rigoureuses que celles de l'Etat et que nos collectivités sont en règle générale bien gérées. Il faut donc bien rappeler que l'Etat nous transfère des compétences ou des activités sans les ressources équivalentes et que les économies qu'il fait, par exemple avec la dématérialisation, pèsent sur nos services administratifs. Il augment notre charge de travail de façon continue sans que nous ne puissions rien y faire. La Cour des comptes fait remarquer que nous ne savons pas maîtriser l'évolution de notre masse salariale, mais il nous faut bien faire face à l'accumulation des mesures décidées unilatéralement et qui ont un impact direct sur nos dépenses de personnel. Nous réfutant cette analyse partiale et fausse de la Cour des comptes et soutenons le combat de l'AMF pour une négociation globale sur la baisse des dotations dont les conséquences se font sentir sur l'investissement local, la croissance et l'emploi...»

 

Respecter les communes et les maires


Le secrétaire général s'est montré tout aussi critique sur la loi NOTre : «En l'état, elle ne sera pas notre loi ... Nous ne pouvons pas accepter une gestion purement arithmétique précisant un soi-disant seuil de rentabilité qui ne prend en compte ni la géographie, ni la topographie et qui balaie au passage toutes considérations sociales et humaines. Il faut respecter les communes et les maires, faire confiance aux élus pour déterminer les périmètres les plus cohérents des intercommunalités, conforter le principe de subsidiarité et les transferts volontaires de compétences, mutualiser efficacement et stabiliser les règles pour avancer...»

A l'échelon départemental, Jean-Louis Maitre épingle le conseil départemental de l'Education Nationale «où nous avons refusé la proposition de carte scolaire qui une fois encore fait payer un lourd tribut à notre département. Nous ne pouvons souscrire à ces orientations qui, année après année, concourent à la désertification des zones rurales, là où nous aurions le plus besoin d'apporter un soutien pour conserver une école publique de qualité...».
Autre pique en direction de la commission départementale de consommation des espaces agricoles qui va évoluer en intégrant les espaces naturels et forestiers. «Nous avons au cours de cette année, pris quelques distances pour montre notre désaccord sur son fonctionnement mais ce sujet qui touche à l'urbanisme, domaine si important pour le développement de nos communes, reste prioritaire pour nous. Nous continuerons donc à faire valoir et défendre nos positions malgré notre sous-représentation dans cette instance. Il ne peut y avoir qu'un seul dogme, il faut que chacun puisse trouver sa place dans un partage concerté et respectueux des hommes et des territoires...»

 

Michel Ravet

 


Ils ont dit...

La baisse de dotations de l'Etat aux collectivités locales, Clément Pernot, le président du conseil départemental, la qualifie d' «agression financière». Soucieux de « redonner confiance aux maires du Jura », il annonce la volonté d'accompagnement financier de l'assemblée départementale : «Un acte fort, pérennisé dans le cadre de politiques de soutien...». Pour lui, le conseil départemental doit être un facilitateur, un catalyseur de projets, tout en rappelant que «les dossiers qui ne sont pas de sa compétence seront mis au placard...»
 
Le conseiller régional Pierre Grosset ne se sentait «pas très à l'aise» devant cette assemblée de maires, surtout sur la question d'actualité qu'est la réforme des régions. Il rappelle néanmoins les axes forts des engagements du conseil régional – collectivité qui ne peut pas lever l'impôt – et son rôle d'accompagnement sur les projets.
 
Jacques Pélissard intervenait en sa qualité de président d'honneur de l'association des maires de France... Il évoque a loi de finances 2015 et la baisse des dotations "considérables" : moins 28 milliards de capacité d'investiguer pour les collectivités locales. Et qui dit moins d'investissements, dit aussi moins de richesse produite. Un groupe de travail a été constitué pour accompagner les procédures de baisse de dotations. Aujourd'hui, en France, 50 communes ne peuvent plus payer leurs annuités d'emprunt.
Il dit sa «préoccupation» sur la loi Notre qui donne toutes les compétences aux intercommunalités : «Pas de définition de l'intérêt communautaire, des PLU automatiques, pas de mutualisation, mas de transferts de compétences, le problème de la représentation des petites communes... C'est la mort programmée des communes et nous n'en voulons pas. Nous voulons continuer à désigner nos délégués communautaires, mais dans un cadre communal...»
 
Jacques Quastana, le préfet du Jura, parle de l'actualité de la réforme territoriale. «Des réflexions sont en cours pour permettre à l'Etat de demeurer présent à vos côtés, sans remettre en cause les implantations locales...». Sa volonté est de «rendre l'Etat plus efficace dans l'accompagnement des acteurs des territoires dont les élus locaux...»
Certes, il constate que, dans le Jura, les dotations ont baissent de 7,5% en 2014... mais que la DETR n'a jamais été aussi élevée (49 millions d'euros), que le FCTVA a remboursé 22 millions d'euros aux collectivités en 2014... Il en appelle à «la rigueur sur l'organisation et sur le fonctionnement collectif...» . Rigueur que ses services s'appliquent puisque la préfecture du Jura a vu ses effectifs réduits de 25% avec le non remplacement des départs à la retraite... Mesure qui, selon lui, «n'a pas entamé les performances de l'administration.»