LA COMMUNICATION EN DEBAT
La com des villes et la com des champs

La veille des obsèques de Xavier Beulin, Christiane Lambert qui assure l'intérim à la présidence de la FNSEA, est venue dans le Jura pour parler de communication. Et donner une certaine forme d'espoir face à une vision médiatique très citadine et mal vécue par les agriculteurs.
 La com des villes et la com des champs

La présence de Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA et d'Hervé Plagnol, le directeur des rédactions d'Agrapresse, a permis d'ouvrir un débat particulièrement intéressant sur lors de la dernière assemblée générale de la FDSEA du Jura. Le thème : les attaques médiatiques, de plus en plus nombreuses et régulières, qui détruisent l'agriculture traditionnelle...

Christiane Lambert constate que « beaucoup d'agriculteurs se disent injustement critiqués... Nous vivons dans une société citadine, en recherche d'idéal de la campagne. Une campagne qui, pour nous, est aussi un espace de production qui souffre aussi de difficultés sanitaires. S'ajoute à cela une politisation des débats et la présence de mouvements qui, crescendo, prennent de l'ampleur. Nous devons aussi regarder comment évolue cette société. Prenons l'exemple du bien-être animal qui n'est plus une histoire d'écolos-bobos. De plus en plus de publications, de travaux de sociologues et autres s'intéressent au sujet. A la FNSEA nous considérons que ces sujets peuvent avoir autant de conséquences que les problématiques environnementales si nous ne les prenons pas à bras le corps. Et tout de suite ! Et sans penser que tout cela va s'éteindre... »
Hervé Plagnol va plus loin dans l'analyse. Il parle des « préoccupations de Français citadins et bien nourris qui ne comprennent plus très bien la manière dont vous les agriculteurs travaillez». Il évoque aussi l'aspect haut-parleur qui est donné au discours sociétal par la manière dont travaillent les médias. Et de citer les « rubricards », ces journalistes qui connaissaient très bien leurs secteurs respectifs, l'agriculture en particulier : « Aujourd'hui, il n'y en a presque plus. Ce sont des journalistes qui ne vont plus sur le terrain agricole, des journalistes citadins, qui traient l'info agricole sur un mode citadin et pour des lecteurs citadins... »
Alors comment faire face à cette notion d'une agriculture traitée comme un sujet de société ? Christiane Lambert propose de communiquer en partant de ce qui touche la société : l'alimentation. Plus généralement, elle considère que « On a trop souvent pensé que la communication était un petit sujet. Aujourd'hui, nous devons reprendre la parole, parler, nous former à la communication pour présenter ce qu'est véritablement l'agriculture... pour continuer à être présents et puissants ! Suivons, postons pour arriver à contrebalancer les effets de toutes ves vidéos et images négatives pour notre métier ! »
Hervé Plagnol propose de ne pas raisonner seulement en terme de métier mais de répondre sur un plan sociétal car les agriculteurs portent eux-mêmes un modèle de vie : « Vous n'osez pas entrer sur ces questions de société. Il faut accepter ce genre de débat, oser s'expliquer et communiquer de manière plus unie... »
A la question de mise en place d'une stratégie, Christiane Lambert se dit « pas gênée s'il n'y a pas de stratégie définie... Ce ne sont plus les initiés et les connaisseurs qui écrivent sur les réseaux sociaux. Peu importe d'où ça vient, il faut que ça foisonne... Utilisez les bons mots ! »
Mais peut-on tout montrer se demande la salle, en citant les images d'écornage de cabris ou de castration de porcelets ? Pour Hervé Plagnol, « Le rêve n'est pas aussi beau que cela... Il faut quand même expliquer nos gestes habituels, tout en gardant à l'esprit que tous ceux qui verront ces images ne réagiront pas comme nous. Mais montrons des élevages irréprochables, soyons le plus irréprochables possible ! »

 

Michel Ravet

 

 

Quelques morceaux choisis...

 
Jean-Marie Sermier, le député-maire de Dole donne un chiffre : 89% des Français soutiennent et apprécient leurs agriculteurs. « Tout n'est donc pas foutu ! Et je vous encourage à vous mobiliser sur ce sujet de la communication et sur l'ouverture de vos exploitations. Mais il faut une communication simple si vous voulez vous faire entendre... »

Christiane Lambert : « Soyons honnêtes dans notre façon de présenter notre métier. On ne peut pas passer 364 jours par an à ronchonner et, pour la journée de l'installation, dire « venez, c'est un beau métier ! »... »

Alain Mathieu, le président de la fédération des coopératives laitières du Jura : « Il faut aussi garder une part de rêve dans ce que nous voulons vendre. L'acte d'achat du consommateur comporte toujours une part d'idéal, une recherche de valeurs refuges et sécurisantes. »

Hervé Plagnol : « Investissez encore plus sur toutes ces questions, pour mieux y répondre, même sur un plan philosophique et dès qu'il survient un souci. »

Clément Pernot, le président du conseil départemental : « Vigilance par rapport aux sujets qui peuvent connaître uné évolution sociétale... Mais de quelle manière régir car aujourd'hui, pour les collectivités, la tendance c'est plutôt de céder aux modes ?»

Christiane Lambert : « Aujourd'hui les Français demandent du bio. Nous sommes capables d'en produire sinon, c'est du bio qui viendra d'ailleurs. Produisons du bio en défendant autant l'idéologie que la technique, mais un bio qui ne soit pas marqué d'une idéologie politique ! »