RETROSPECTIVE
1999, la tempête du siècle dévaste la forêt jurassienne

Lothar et Martin. Deux prénoms. Deux tempêtes qui ont traversé la France d'Ouest en Est entre le 26 et le 28 décembre 1999, avec des vents dépassant les 150 km/h. En quelques heures seulement, ces phénomènes climatiques ont provoqué sans doute la plus grande catastrophe naturelle et économique jamais connue pour une commune telle que Mignovillard. Des dizaines de milliers de m3 d'arbres dévastés par le vent, des centaines d'hectares de forêts publiques et privées à terre.
1999, la tempête du siècle dévaste la forêt jurassienne

Patricia Nicot était chef de la division ONF de Poligny en 1999. Rentrant d'un séjour en Auvergne, elle avait entendu parler du passage de la tempête. A la radio, comme tout le monde... Ce sont les coups de fil de Jean-Claude Arbey et Jean-Luc Bourgeois, ses agents du secteur, qui lui ont tout de suite permis de mesurer l'ampleur de la catastrophe qu'elle allait découvrir quelques heures plus tard à son arrivée dans le Jura.

« La Joux et Mignovillard étaient les secteurs les plus touchés, les plus visibles, se souvient-elle. La D 107 était coupée par des bois couchés sur 6 mètres de hauteur et c'était un véritable mikado qui barrait la D 55 à Mignovillard... On ne pouvait pas pénétrer sur ces secteurs mais on se rendait bien compte que les dégâts seraient d'une ampleur inédite... »
Les premières dispositions qui ont été prises concernaient la sécurité des usagers de la forêt. Pour éviter les suraccidents, des arrêtés municipaux ont été signés pour interdire l'accès à tous les usagers, en particulier aux skieurs toujours nombreux sur le secteur de Mignovillard.
Puis, après avoir trouvé des bûcherons, il a fallu réouvrir les routes à la circulation et aménager des accès vers le coeur des massifs pour pouvoir évaluer les dégâts. « On s'est rendu compte que, selon les secteurs, les dégâts étaient très disparâtres, poursuit-elle. Le massif résineux était le plus touché, sur Champagnole et le Haut de Poligny en particulier... Même limités par nos capacités de bûcheronnage, il a fallu agir très vite. Intervenir avant le redémarrage de la sève et avant que les bois, versés en majorité, ne se déprécient !... »

 

Huit aires de stockage


Puis plusieurs mesures ont été prises pour panser la forêt et éviter que le marché du bois ne s'effondre à cause de cette arrivée massive de bois. Par solidarité, les communes qui n'avaient pas été touchées ont décidé de geler leurs coupes. Et il n'y eu pas de marquage de bois les deux années suivantes.
Puis les aires furent aménagées pour y stocker des chablis arrosés en 2002. Huit aires de stockage ont été ouvertes dans le département. Ce qui était une nouveauté dans le Jura ! Et, malgré les craintes intiales des scieurs, cette opération connut un véritable succès. « Personne n'a oublié la première ouverture de bois arrosés. A l'intérieur, le bois était parfaitement blanc. A tel point qu'il a été décidé d'en faire des planches à fromages pour les caves d'affinage ! ». Il a fallu attendre les années 2002 – 2003 pour qu'on recommence à écouler des bois sans arrosage... Certaines de ces aires de stockage sont encore utilisées aujourd'hui.

 

Tempêtes et... épidémies


La fruitière des bois façonné a été créée à cette époque. Elle permettait de mutualiser complètement les apports de bois de différentes origines et de mettre en place un système de vente en lots collectifs de façon progressive. Les produits étaient redistribués au prorata des parts de chacun dans la fruitière. « Au niveau des cours, on a limité la casse, explique encore Patricia Nicot. Les prix de vente nous ont permis d'absorber les coûts d'exploitation supplémentaires... Mais hélas, il y a toujours eu des épidémies qui suivaient les tempêtes. Et en 2003, année de canicule et de sécheresse, nous avons connu la première crise de scolytes. Et on a perdu presque autant de bois avec cette crise des scolytes qu'avec la tempête ! Les bois sont fragilisés et dépérissent les années qui suivent. Ce fut le cas en 2005 et 2006 avec des volumes soclytés très importants... »
Aujourd'hui, vingt ans après la tempête, la forêt est toujours dans la configuration sécheresse et crise de scolytes. « Il y a toujours eu des tempêtes et des épidémies qui leur ont succédé, explique encore Patricia Nicot. Aujourd'hui l'implantation d'ilots d'avenir nous permet de travailler avec des espèces différentes, plus méditerranéennes. Mais nous avons besoin de plus de temps pour les implanter. Et les épidémies sont de plus en plus fréquentes !... »

 

M.R.