La volaille de Bresse, côté basse-cour et côté cuisine

Gastronomie / Les Glorieuses de Bresse sont de retour ! Remplacées en 2020 par des marchés d’exception pour cause de crise sanitaire, elles se tiendront cette année les 14, 17, 18 et 19 décembre prochain. En amont, le Comité Interprofessionnel de la Volaille de Bresse (CIVB) a organisé une journée découverte pour tout connaître sur les coulisses de cette AOC, de son élevage à la cuisine.

La volaille de Bresse, côté basse-cour et côté cuisine
Avec ses pattes bleues, lisses et fines, son plumage intégralement blanc et sa crête et ses barbillons rouges, la volaille de Bresse est reconnaissable entre mille.

La volaille de Bresse est la seule en France à bénéficier d'une AOC. Son aire géographique s’étale sur toute la Bresse, à cheval sur trois départements : l’Ain, le Jura et la Saône-et-Loire. A l’EARL du lavoir, à Biziat (01), Ghislaine et Eric Deroche sont, en ce début d’automne, en pleine effervescence pour préparer les fêtes : nettoyage des épinettes, ces cages de finition, pour y placer les chapons, réception des poussins qui seront commercialisés à Pâques, récolte du maïs, semis du blé...

Le couple a repris l’exploitation en 1998 après s’être tous deux reconvertis. Chaque année, ils élèvent 15 000 volailles, 600 chapons et 800 poulardes sur les 16 hectares de parc.

Le cahier des charges de l’AOC est clair : toute la chaîne de production, de la naissance du poussin à l’abattage, en passant par la production de l’alimentation, doit se faire en Bresse. Les poussins arrivent à l’âge d’un jour et sont placés un mois en poussinière chauffée avant de retrouver leur liberté dans des espaces herbeux où ils peuvent développer leurs muscles et chasser le tiers de leur nourriture. Chaque animal doit disposer d’au moins 10 m².

Le complément d’alimentation est produit sur place. Pour nourrir leurs protégés, le couple produit du maïs blanc et jaune sur 20 ha et du blé sur 12 ha. « Nous sommes en autoconsommation, même si à cause de la météo nous risquons d’être juste en blé cette année, » explique Ghislaine Deroche. « Heureusement, nous pouvons adapter les rations et compenser avec du pois. Nous ajoutons aussi de la poudre de lait qui, avec le maïs blanc pauvre en carotène, donne sa blancheur à la peau des volailles ». Pour garantir que le cahier des charges est bien respecté, l’élevage est contrôlé plusieurs fois par an par Certipaq ou par les techniciens du CIVB.

Les volailles étant en liberté, les éleveurs doivent lutter sans cesse contre les nuisibles. « Les milans ont tué une centaine de poulardes l’an passé et les chapons ont subi deux attaques de renards. Nous avons installé des filets électrifiés mais les lapins en profitent pour se développer et finissent par ronger les protections. Les volailles peuvent alors s’enfuir et les renards reviennent. »

Après quatre mois et demi, les volailles sont placées dans les épinettes pour que la chair devienne moelleuse. L’abattage se fait aussi sur place, les éleveurs ayant investi dans une installation aux normes CE en 2019. « Il nous a bien servi pendant le confinement car nous avons pu continuer la vente directe, » poursuit Ghislaine. « C’est un travail délicat car la peau est très fine et il ne faut aucune écorchure. »

Sitôt la volaille abattue, il faut la rouler. Cette tradition bressane consiste à envelopper poulardes et chapons dans une toile végétale très fine et très serrée pour protéger la peau et répartir la graisse. « La volaille de Bresse, c’est autant le goût que l’esthétique. A la fin, le produit doit avoir la forme d’un ballon de rugby. A l’origine, le roulage permettait une meilleure conservation, c’est l’ancêtre de la mise sous vide, » raconte l’éleveuse.

SC

Ghislaine Deroche a procédé à une démonstration de roulage sur un coq

A Vonnas, dans les restaurants de Georges Blanc, la volaille de Bresse est reine. Florent Maréchau, le chef exécutif des établissements, nous révèle sa recette du poulet de Bresse à la crème et dévoile ses secrets pour sublimer le produit. « La cuisine, c’est simple : il faut un bon produit, une bonne cuisson et un bon assaisonnement, » résume-t-il.

La volaille, sortie du frigo quelques heures avant la préparation, est d’abord rapidement. Elle doit ensuite être découpée car chaque morceau nécessite un temps de cuisson différent. C’est tout un art : Florent Maréchau l’exécute avec une facilité déconcertante : « C’est très simple, un petit couteau suffit. Il faut repérer les parties graisseuses et tourner autour ».

Les blancs, le coffre et les sot-l’y-laisse sont cuits au four à 190° (35 minutes pour les premiers et 9 minutes pour les sot-l’y-laisse) avec un peu de beurre. Après avoir été salées et poivrées, les cuisses cuiront pendant presque une heure dans une cocotte en fonte. Le chef les fait revenir dans du beurre avant d’ajouter du vin blanc Chardonnay et la garniture : ail blanc en chemise, un oignon blanc et des champignons émincés. Il recouvre le tout de crème (AOP de Bresse bien sûr). « Il ne faut jamais couvrir la casserole pour pas que l’eau d’évaporation ne s’y redépose et surtout ne jamais porter à ébullition, » conseille le professionnel.  Au bout de 30 minutes, il égoutte les morceaux pour les décanter, passe la sauce dans une étamine et rajoute les blancs et les sot-l’y-laisse.

La cocotte est déglacée au vin blanc. « Les sucs formés par les jus qui caramélisent au fond de la cocotte sont très importants car le gras est un conducteur de goûts. Et comme le dit un ami à moi, le gras, c’est la vie, » plaisante-t-il. « Mais comme le dit mon médecin, il ne faut pas en abuser ». Dernière touche, il ajoute un peu de vinaigre de vin rouge pour relever l’acidité du plat. Il ne reste plus qu’à laisser reposer la viande pour uniformiser le goût (le temps de repos doit être équivalent au temps de cuisson), quitte à la réchauffer avant de la servir.

La totalité ou presque de la volaille de Bresse peut se cuisiner. Florent Maréchau affectionne particulièrement le travail du foie qui « au début de l’hiver, se rapproche du foie gras. »

Florent Maréchau commence par flamber la volaille au chalumeau, en prenant soin d’éviter les chairs découvertes.

Georges Blanc et le CIVB ont dévoilé l'affiche des Glorieuses de Bresse 2021