Fédération des chasseurs du Jura
De vrais moyens pour réduire les dégâts de gibier

Le Jura compte un peu plus de 7 000 chasseurs qui exercent leur mode de vie « comme une passion », malgré des dossiers lourds comme la flambée des coûts de dégâts de gibier, la sécurité ou encore le sentiment anti-chasse attisé par certains… Échos de l’assemblée générale.

De vrais moyens pour réduire les dégâts de gibier
Plus de 400 chasseurs réunis à Champagnole

Dans le Jura, près de 560 000 euros de d’indemnisations ont été versés par les chasseurs pour les dégâts de gibiers sur les cultures et les prairies en 2021-2022. Un chiffre record. Si on ajoute les honoraires des estimateurs et les diverses mesures pour prévenir et limiter ces dégâts, les dépenses affectées à ce compte dépassent les 860 000 euros.

« Aujourd’hui la chasse française est confrontée à de gros problèmes. Le dossier des dégâts de gibier en est un », martèle Christian Lagalice, président de la fédération de chasse du Jura devant les 400 chasseurs réunis à Champagnole le 1er avril dernier.

2022-2023 s’annonce moins tendue, « à condition que les prix des denrées agricoles se stabilisent et que les dégâts de printemps sur prairies et de cet été sur céréales restent contenus », indique Yves Duvois, trésorier de la Fédération. Le contexte de guerre en Ukraine laisse toujours craindre une flambée des prix des céréales, qui serait impactante pour le monde de la chasse même si l’État a pris, dans le cadre d’un plan de résilience, l’engagement de financer les écarts de prix trop importants. Cela représente en 2022 une enveloppe de 20 millions d’euros versée par l’État, 170 000 euros dans le Jura qui ont été reversés aux agriculteurs.

Pas de chasse de nuit

Des négociations ont lieu au niveau national sur les dégâts de gibier afin de trouver de nouvelles ressources pour leur financement car certaines fédérations font face à de grandes difficultés financières, « la fédération n’est pas dans ce cas », précise le président Lagalice. Il s’agit, en plus du plan de résilience 2022, d’une enveloppe nationale de 60 millions d’euros sur 3 ans, de 2023 à 2025, pour accompagner les fédérations de chasse dans l’objectif de réduire les surfaces impactées par les dégâts. « Un objectif partagé avec toutes les organisations agricoles et le gouvernement », précise Christian Lagalice qui se réjouit que les fédérations et les chasseurs aient enfin « de vrais moyens d’action pour faire baisser ces dégâts ». Y compris avec un agrainage dissuasif qui va être autorisé et contractualisé entre les territoires de chasse et leur fédération. « Mais attention, agrainage ne veut pas dire nourrissage ! », prévient le président de la fédération du Jura en direction des chasseurs. Quant à la traduction réglementaire par les services de l’État de cet accord, il redit son souhait de ne pas voir se développer dans le Jura « de mesures extrêmes, comme la chasse de nuit du sanglier », « ni de milices cynégétiques » comme dans le canton de Genève ou certains länder allemands.  « Les négociations avec le monde agricole, forestier et l’administration ne sont pas finies… », conclut le président Lagalice.

La sécurité : toujours une priorité

Autre dossier d’importance pour le monde de la chasse, celui de la sécurité pour les chasseurs et les non-chasseurs. « Nous n’avons pas attendu les politiques pour nous mobiliser, divisant par 4 l’ensemble des accidents de chasse en 20 ans seulement et même par 5 pour ceux qui sont mortels. N’oublions pas que, dans le même temps, nous avons multiplié par 5 le nombre de coups de carabine pour faire face à l’explosion du grand gibier », précise le président de la fédération des chasseurs Mais l’actualité du mois de janvier dans le Jura rappelle à chacun que « ce chantier ne cessera jamais : la sécurité sera toujours une priorité ! ».

Car la sécurité reste une porte d’entrée pour stigmatiser la chasse et les chasseurs.

La Fédération des chasseurs a reçu le soutien des nombreux parlementaires présents et du président du conseil départemental

Les anti-chasse

Depuis quelques années le problème « anti-chasse » semble s’amplifier : deux visions s’opposent. « Ne tombons pas dans ce piège politique grotesque qu’on nous tend, celui de monter les gens les uns contre les autres à des fins de chaos à peine voilés… ». Dans une diatribe musclée et imagée comme il sait le faire, Christian Lagalice relève les contradictions des associations « dites » de protection de la nature qui ont pour objectif « d’embêter les ruraux, vivre de l’argent public et proférer des mensonges ». Sans oublier « ceux qui avancent à pas de loup pour se placer en vue de futures échéances… ». Cette fois c’est le député écologiste qui porte un projet de loi devant l’Assemblée nationale le 6 avril qui est visé. « Un projet qui ne comporte qu’un seul point, l’interdiction de chasser le dimanche, et donc un seul objectif, tuer la chasse populaire » , alerte le président Lagalice, en demandant aux parlementaires jurassiens leur soutien sur ce point. Ils étaient présents nombreux à Champagnole ce matin d’assemblée générale : les députées Marie-Christine Dalloz, Justine Gruet, Danièle Brulebois. Chacune a pu exprimer son soutien aux activités de chasse dans le Jura. À la tribune de cette assemblée générale, les chasseurs du Jura accueillaient également Sylvie Vermeillet, sénatrice, Clément Pernot, président du conseil départemental, Stéphane Woynaroski, conseiller régional, représentant la présidente de la région, ainsi que Sandrine Gauthier-Pacoud, présidente de l’Association des maires du Jura et François Lavrut, président de la chambre d’agriculture.

« Notre manière de vivre »

Pour Clément Pernot, cette proposition d’interdiction de chasse le dimanche « va à l’encontre de l’essence même de notre manière de vivre ». Le soutien du président du département passe aussi par une reconnaissance des apports du monde de la chasse à la biodiversité et au territoire jurassien (zones humides, rivières, etc). Et de saluer le travail réalisé sur les Espaces naturels sensibles qui bénéficient de l’ingénierie de la fédération de chasse du Jura et de la fédération de pêche. « C’est une priorité pour nous de nous appuyer sur ceux qui connaissent le terrain », insiste le président Pernot.

Marie-Christine Dalloz, députée membre du membres du groupe d'études «chasse et pêche» à l’Assemblée refuse fermement d’opposer les usages et les usagers de la nature. Elle se veut rassurante : « le texte des groupes écologistes était clairement une opposition pure et simple à la chasse. Il a été rejeté en commission du développement durable cette semaine, vous pouvez dormir sur vos deux oreilles ! ». Applaudissements dans la salle.

Intégrer les mesures nationales

Le préfet du Jura, Serge Castel, encourage « à ne pas prêter le flanc à la ‘’chasse-bashing’’ ». Cela passe, pour le représentant de l’État, par l’intégration des futures mesures nationales dans le schéma départemental cynégétique. « Le bon sens devrait l’emporter grâce à nos relations de travail et vos bonnes relations dans le Jura, entre la fédération des chasseurs et les agriculteurs », tient à souligner Serge Castel. Le préfet est intervenu également sur d’autres sujets comme le loup. « J’ai besoin des chasseurs pour que les chiffres (de comptage) que nous obtiendrons souffrent le minimum de contradiction ». L’augmentation nationale des populations de cerfs. « Trouvons ensemble un juste équilibre qui permette la régénérescence des forêts qui est vitale pour notre département ». Et enfin le changement climatique, la biodiversité et la vulnérabilité aux feux de forêt. « Avec plus de 7 000 chasseurs, vous êtes représentatif de ce qui se passe sur le territoire et dans la nature. Vous êtes impliqué dans la rénovation de milieux. J’ai besoin de vous, en n’excluant aucun acteur de terrain, pour trouver rapidement une résilience et une adaptation au changement climatique dans le Jura »

L’assemblée générale s’est conclue par le vote des résolutions, avec notamment une augmentation du coût du bracelet de transport sanglier de 3 euros pour passer à 25 euros. Ce bracelet finance les dégâts. Enfin les chasseurs ont honoré cinq Jurassiens, chasseurs ou estimateurs de dégâts, à qui il a été remis une médaille : Gilbert Antoine, Claude Troupel, Claude Régazoni, Bernard Rude et Michel Poncet. Un concert de trompes et un bon repas ont terminé cette journée sur une note conviviale.

IR

Pour le préfet Serge Castel, « le bon sens devrait l’emporter » dans la lutte future contre les dégâts de gibier, « grâce aux bonnes relations entre chasseurs et agriculteurs qui sont à souligner dans le Jura »

En bref

Dégâts de gibier

« Sur la question des dégâts, votre rôle est essentiel pour la gestion des populations de sangliers qui vous permettent de vivre votre passion. Nous avons encore quelques points noirs dans le département », rappelle François Lavrut, président de la chambre d’agriculture. Et d’ajouter : « Le rôle des agriculteurs est de pouvoir travailler sur le territoire pour produire de l’alimentation et nourrir les Français. De votre côté vous jouez un rôle important dans la préservation de la biodiversité, des zones humides, les haies, les bandes enherbées… Trouvons les bons moyens ensemble pour préserver les plantations, avec un partenariat gagnant-gagnant sur nos territoires ruraux. » Concernant le loup, le président de la chambre d’agriculture remercie la FDC39 pour son rôle dans la formation des agriculteurs qui souhaitent passer le permis de chasser et pour l’engagement important des louvetiers.

La part du loup

« Je n’augmenterai pas le plan de chasse cerf là où le loup est présent. Dans un souci de cohabitation avec le grand prédateur, je lui laisserai sa part pour ne pas pénaliser les chasseurs », prévient Christian Lagalice

Effectifs en baisse

« Dans le contexte sanitaire encore chaotique de 2022, on observe pour cette saison une baisse significative des validations de permis de chasser », indique Francine Mauron, secrétaire de la Fédération de chasse. Soit 7 029 validations contre 7 182 l’année précédente.

Recherche territoires

« Nous continuons notre politique d’acquisition foncière, grâce à des aides, avec deux objectifs : préserver les espaces et les espèces et montrer notre présence pour empêcher certains milieux d’échapper aux chasseurs », explique Gilles David, vice-président de la FDC39. 24 ha sont en passe d’être achetés, principalement en Bresse, avec des projets menés en partenariat avec les collectivités et d’autres partenaires (Agence de l’eau, Fondation, fédération de pêche, entreprises…).

Grand partenaire

Le monde agricole est un « grand partenaire » avec lequel la fédération des chasseurs poursuit plusieurs actions : le projet Durban sur la gestion des bandes enherbées, le programme « Plantons des haies » avec 4,33 km de plantation sur 5 exploitations, le projet « Avenir agriculture Jura » en partenariat avec la chambre d’agriculture et le conseil départemental pour préserver les couples de courlis en plaine en cas de fauche de prairies, et enfin le programme « Agrifaune » en faveur de la petite faune et de la biodiversité.

Ecocontribution

Chaque année, la FDC39 mobilise 140 000 euros via l’Ecocontribution fiancé par l’État dans des programmes variés : éducation à l’environnement, limitation de la mortalité de la faune sauvage, réseau biodiversité, … Des programmes menés en lien avec l’Office français de la biodiversité.

Rivière en bon état

Les travaux de restauration du ruisseau du marais de Panesières par la FDC39 lui ont permis d’obtenir le label « Rivière en bon état », décerné par l’Agence de l’eau.