TAVAUX/ Une troupe d’une centaine de brebis attaquée dans la réserve nationale naturelle de l’Île du Girard. Le loup est suspecté.
Dans la nuit du 28 au 29 novembre, un troupeau de 109 brebis et 3 béliers en pâture sur la réserve du Girard, située sur les communes de Gevry, Molay, Parcey et Rahon, a subi une attaque qui a créé la panique parmi les bêtes. Le lendemain matin, Thomas Mûller, agriculteurs à Tavaux et propriétaire du troupeau, retrouve 9 animaux morts et 4 autres blessés, qui ont dû être euthanasiés après l’arrivée du vétérinaire. « Certains animaux affolés ont traversé le Doubs. Une brebis est encore manquante », raconte l’éleveur.
Des agents de l’Office français de la biodiversité se sont rendus sur place pour effectuer les constats de dommages. Faute de présence avérée de loup dans le secteur, on ne peut parler pour le moment que de suspicion.
« Les attaques ne semblent pas provenir de chiens car ils auraient consommé la viande. Les brebis ont été prises à la gorge, la cage thoracique ouverte et les abats mangés, ce qui ressemble davantage à une attaque de loup », indique l’agriculteur qui s’appuie sur les propos des spécialistes.
Dommages collatéraux
Les brebis retrouvées mortes devraient être indemnisées mais la plus grande inquiétude de l’éleveur concerne les risques d'avortement : les brebis étaient gestantes de 2 mois au moment des faits. Une perte collatérale qui n’est habituellement pas prise en compte.
Les brebis pâturent chaque été depuis 3 ans dans la réserve naturelle de l'île du Girard pour permettre la conservation de milieux ouverts. Cette année, exceptionnellement, la saison de pâturage a été prolongée pour nettoyer certaines pâtures. « C’est un coup de pas de chance, les brebis étaient là quand le loup est passé… ». Si Thomas Müller reste philosophe, il avoue que cette mésaventure a provoqué un stress, sans compter les appels signalant que le loup rôderait encore…
« Aucun élevage n’est aujourd’hui à l’abri »
Christian Lagalice, président de la fédération des chasseurs du Jura et membre du groupe « grands prédateurs » à la fédération nationale des chasseurs, revient pour nous sur cette attaque et nous donne son avis de spécialiste. « La meute de loups la plus proche se situe sur le massif franco-suisse, dans le Haut-Jura, soit à 100 km à vol d’oiseau de la réserve du Girard. Les dernières attaques qui ont eu lieu dans le Haut-Doubs ou sur les Plateaux de Langres sont pratiquement à cette même distance. Nous sommes donc confrontés à un loup erratique. Il ne s’installera pas mais il pourrait faire ici une étape s’il trouve à manger. Comme il peut aussi ne jamais revenir ! Ce qui me surprend, c’est le choix de l’endroit. La plaine alentour regorge de chevreuils et la forêt de Chaux n’est pas loin, avec sa réserve de cerfs. Ici, l’animal a préféré la solution de facilité : attaquer des brebis, profitant d’un lieu où la fréquentation est limitée. Ce qui semble indiquer qu’aucun élevage aujourd’hui n’est véritablement à l’abri et que les obstacles ne l’arrêtent pas : cet animal, d’où qu’il vienne, a dû passer l’autoroute ainsi que le Doubs ou la Saône pour venir sur l'île du Girard. Je le dis clairement, il n’est pas souhaitable que le loup s’installe dans le secteur car la concentration d’animaux d’élevage est bien plus importante que dans le Haut-Jura. L’enjeu serait autrement plus grave. J’espère également que des analyses génétiques vont être menées. IL serait intéressant de connaître l’origine de ce loup… »
Isabelle Renaut
Les attaques de loups dans le Jura
Les dernières attaques de loups sur troupeaux datent de 2019.
Le 16 mai 2019, un constat de dommages sur un troupeau de 45 bêtes dans la commune d’Arbois fait état de 5 brebis tuées.
Le 6 août 2019, une prédation sur un troupeau de plus de 400 bêtes a eu lieu sur les pâturages situés dans le massif du Risoux dans la commune de Bellefontaine : 9 brebis tuées et plusieurs autres non retrouvées, soit une vingtaine de bêtes au total.
La zone de présence permanente du loup, établie en 2018 par l’ONCFS, se situe essentiellement en Suisse. Du côté français, elle couvre le secteur Bellefontaine-Bois d’Amont à Lajoux dans le Jura et le secteur de Mouthe à Chapelle des Bois dans le Doubs.