Foncier
Le statut du fermage, pilier d’une transmission réussie

Le congrès de la Section nationale des fermiers métayers s’est tenu, les 22 et 23 février dernier, dans le département de la Loire, une terre d’élevage où plus de 75 % de la surface agricole utile est exploitée en fermage. La transmission était au menu des travaux des congressistes.

Le statut du fermage, pilier d’une transmission réussie
Yannick Foucault pendant le discours de la Bourgogne Franche-Comté

En guise de mise en bouche, les congressistes devaient identifier les conditions de réussite pour une meilleure transmission. Vaste sujet où les fermiers ont souligné l’importance de la communication avec les bailleurs concernant la remise du foncier lors de la transmission mais aussi l’accompagnement des porteurs de projet afin qu’ils soient plus conscients des droits et obligations du fermier et ceux du bailleur. Une autre question était servie aux représentants des sections fermiers métayers : « Qu’est-ce qu’être agriculteur en 2030, être porteur d’un projet économique ou un statut professionnel ? ». Les fermiers ont indiqué que le projet économique va de pair avec le projet professionnel, toutefois l’agriculture ne sera peut-être plus comme elle était auparavant, c’est-à-dire le projet de toute une vie. La délégation Bourgogne Franche-Comté en a profité pour faire remonter certaines problématiques régionales comme la difficulté du renouvellement des générations ou encore la perte d’hectares lors de la transmission des exploitations. Par ailleurs, les représentants des autres régions ont proposé la révision de la méthode de calcul de l’évolution du fermage, afin de rétablir un indice régional dans le but de supprimer les inégalités dues aux aléas climatiques.

Entreprendre comme le JA le souhaite

Pour poursuivre les festivités, il était proposé une table ronde sur le thème « le statut du fermage : pilier d’une transmission réussie ». Michel Joux, président de la FRSEA Auvergne Rhône-Alpes, Julien Rouger, porte-parole des Jeunes Agriculteurs, Fabrice Pannekoucke, vice-président de la région Auvergne Rhône-Alpes en charge de l’agriculture et Patrice Chaillou, secrétaire général de la section nationale des fermiers métayers, ont échangé sur le sujet. Cette table ronde a permis de mettre en évidence que le statut du fermage permet de contribuer au renouvellement des générations. En effet, la mise à bail est la solution pour les jeunes installés afin d’investir dans des outils de production plutôt que dans le foncier. Le statut du fermage permet notamment au jeune agriculteur, d’entreprendre comme il le souhaite en fonction de sa production. Il demeure donc encore aujourd’hui comme un grand acquis syndical pour la profession.

Enfin, les congressistes ont échangé sur la proposition de loi déposée par le député Jean Terlier. Malheureusement, cette proposition reprend seulement quelques éléments de l’accord trouvé entre les fermiers et les propriétaires validé par la FNSEA. Les fermiers métayers regrettent que le député Terlier n’ai pas repris les deux préalables exigés par la section : le renforcement du contrôle des structures et la reconnaissance du statut de l’agriculteur professionnel

Anaïs Renard

Pour la section BFC de gauche à droite : Dominique Duthu (21), Anaïs Renard (39), Fabrice Chabod (25), Olivier Briet (71), Benoit Lahaye (21), Aurélie Lucas (71), Emilie Laithier (25), Pierre Villard (71), Yannick Foucault (39).
Sébastien Delafosse succède à Bertrand Lapalus
Sébastien Delafosse, 53 ans, est le nouveau président de la SNFM. Il succède à Bertrand Lapalus.

Sébastien Delafosse succède à Bertrand Lapalus


Agriculteur dans la Manche en production laitière, Sébastien Delafosse, 53 ans, succède à Bertrand Lapalus au poste de président de la section nationale des fermiers et métayers (SNFM). Denis Labri devient secrétaire général. Après deux mandats passés aux côtés de Patrice Chaillou, désormais ancien secrétaire général et Bertrand Lapalus, le nouveau président de la section est conscient du chantier qu’il reste à conduire. « Nous avons beaucoup travaillé et je pense qu’il faut continuer en ce sens. Lors de ce congrès, beaucoup de choses ont été dites et revendiquées. Il y a sans nul doute du grain à moudre pour les trois prochaines années, même si je pense qu’elles ne seront peut-être pas assez longues pour répondre aux attentes de nos fermiers ». Ainsi, la SNFM souhaite continuer de travailler sur « la transmission bien sûr, mais il y a encore des sujets, comme la fiscalité, le portage de capitaux, ainsi qu’un meilleur suivi sur les installations ». D’où le besoin urgent d’établir « une feuille de route pour les trois prochaines années ». Au nouveau président de conclure : « Ce qui m’importe avant tout, c’est le statut du fermage. Il faut mettre les terres à bail car c’est la seule solution pour les jeunes installés de pouvoir investir dans leur outil de production avant d’acheter du foncier, de le rendre performant, économiquement viable et de laisser au fermier la possibilité d’entreprendre comme il le souhaite en fonction de sa production ».

Histoire

Quid du statut du fermage et de son évolution ?

Le statut du fermage a été créé en 1945-1946. Retour sur son évolution au fil des décennies.

La sécurisation des droits d’usage du sol des producteurs agricoles ne passe pas nécessairement par la propriété du terrain. La mise en place par l’ordonnance du 17 octobre 1945 et la loi du 13 avril 1946 du statut du fermage et du métayage a été un tournant considérable pour les fermiers français. Leur statut s’est vu sécurisé grâce à la législation. Au-delà d’une répartition plus juste des fruits du travail paysan, le nouveau statut du fermage est un cadre favorable à la modernisation du travail des agriculteurs. En réduisant la précarité de leurs conditions, il leur permet de faire des projets d’avenir, d’investir, de se former aux techniques nouvelles, de participer au développement du mouvement coopératif et mutualiste.

Un statut du fermage, mais pourquoi ?

Avant 1946, la situation des locataires de terrain agricole n’était pas définie de manière particulière. Les relations entre propriétaires et locataires étaient régies par le Code civil. La loi applicable au rapport des propriétaires ruraux avec leurs locataires est celle de la liberté contractuelle. Le fermage et le métayage sont réglementés dans le Code civil, mais il s’agit d’une réglementation succincte et supplétive. Les parties peuvent parfaitement y déroger et se trouvent libres d’organiser comme elles l’entendent leurs relations juridiques. Il n’existait donc pas de cadre juridique de référence. De ce fait, les contrats de location de terre n’étaient pas les mêmes suivant les régions et les situations. Le bail, souvent verbal, était conclu pour un an et il n’était pas rare de voir le fermier déménager de ferme en ferme chaque année. Il pouvait être congédié à tout moment sans pouvoir profiter des fruits de son travail. Dans cette France rurale, dominée par la propriété foncière, on n’envisageait pas de revenir sur les droits des propriétaires. Face à cette instabilité permanente, la nécessité d’une intervention de l’État s’est imposée à partir des années 1930.

1946 : création du statut du fermage et métayage

Depuis la fin de la IIIe République, il est apparu nécessaire pour le législateur de protéger l’exploitant agricole en lui assurant une certaine sécurité quant aux terres qu’il exploite. L’ordonnance relative au statut du fermage est prise le 17 octobre 1945 et sera complétée par la loi du 13 avril 1946, qui institue le statut du fermage et métayage. Celui-ci va fixer les droits et obligations des parties, dans l’intérêt bien compris de chacun. Ainsi, le bail va avoir une durée minimale, le fermier obtient un droit au renouvellement, le bailleur voit son droit de reprise encadré. Le prix du bail est fixé de manière précise. Il y a suppression des redevances en espèces et en nature. Dans le même temps, vont être mis en place les tribunaux et les commissions consultatives paritaires des baux ruraux. Le fermier bénéficie d’un droit de préemption en cas de vente des terres louées. Le statut du fermage est, depuis maintenant plus de soixante-quinze ans, le cadre juridique de référence en matière d’accès au foncier agricole et de relations entre propriétaires agricoles et agriculteurs locataires des terres qu’ils cultivent. Ce statut a très largement contribué à sécuriser les conditions d’exercice du métier d’exploitant et à moderniser l’agriculture toute entière.


Marie-Christine Persol,
FDSEA de la Loire, service juridique

Le statut du fermage est le cadre juridique de référence en matière d’accès au foncier agricole et de relations entre propriétaires agricoles et agriculteurs locataires.