Bienvenue en 2050 !

Alimenter la réflexion. Telle était la volonté des administrateurs de la FRCL du Massif jurassien en sollicitant l’intervention de Yannick Roudaut. Pendant près d’une heure trente, il s’est mis dans la peau d’un Français décrivant son environnement en 2050. Envie, anxiété, remise en cause, total déni…

 Bienvenue en 2050 !

Intellectuel formé au journalisme fi­nancier, Breton d’origine, l’homme est vacataire-enseignant dans de nom­breuses écoles d’ingénieur et de com­merce. A Frasne, le 6 avril pendant près d’une heure trente, Yannick Rou­daut s’est mis dans la peau d’un Fran­çais décrivant son environnement en 2050. Cette même personne avait 20 ans en 2023. Envie, anxiété, remise en cause, total déni… C’est surtout une colonie de questions sur ses propres pratiques que l’intervenant aura sus­cité auprès de l’assistance.

« Ce qui ne bouscule pas n’a pas d’in­térêt » : telle est l’entrée en matière de l’intervenant. S’appuyant sur un diaporama plongeant l’assemblée en 2050, Yannick Roudaut projette des images déroutantes. Des bâtiments en bois ou en chanvre, l’utilisation du bé­ton rendue impossible par la notation carbone. Des températures sur la ré­gion oscillant entre 35 et 42°. « Je sais que vous êtes attachés au vin du Jura mais en 2050 les cépages du Jura c’est plus possible dans le Jura. Vous cultiverez du Corbières. C’est pas mal non plus » lance Yannick Rou­daut. Les images défilent en même temps que les propos de l’enseignant les expliquent. Des arbres, arbustes ou plantes aux essences bien différents de celles que nous avons aujourd’hui apparaissent à l’écran. « Des arbres oui mais en nombre, pour se proté­ger du soleil et de la chaleur. Et ces arbres, on en prend soin. En 2050 on se soucie aussi du bien-être végétal. Les plantes ou les arbres ne sont pas taillés n’importe quand et n’importe comment. Eh oui c’est aussi ça le monde de 2050 » poursuit l’éditeur. L’eau devenue précieuse est utilisée avec parcimonie. On sait la capter dans l’air. « Imaginez ce que vous pouvez faire en fromagerie quand on connait les niveaux d’humidité au moment de la transformation du lait » interroge Yannick Roudaut. En 2050, tout est réutilisable, à monter soi-même, réparable. Terminée la société de la surconsommation et du tout je­table. Comment en est-on arrivé là ?

2030 Point de bascule 

Dans un moment assez anxiogène de sa présentation, l’intervenant dé­crit et surtout pointe du doigt tous les excès et abus d’une société à bout de souffle. Très précisément la société dans laquelle nous vivons en 2023. Surconsommation, économie hyper carbonée destructrice du climat, à la­quelle se sont ajoutés une pandémie mondiale et des faits historiques ma­jeurs ont impulsé un changement pro­fond des mentalités et des pratiques. Yannick Roudaut décrit cette insta­bilité. « Crise du Covid-19 en 2020, errance géo-politique avec l’invasion de l’Ukraine par les russes en février 2022. Polarisation du monde. Chinois d’un côté, Américains de l’autre dont les « esprits » se sont échauffés au sujet de l’Ile de Taïwan. Une crise fi­nancière née au Canada début 2023 puis qui résonne dans tous les pays du monde ». 

Yannick Roudaut, intervenant de l’assemblée générale de la FRCL

Après quelques années difficiles qui mènent à 2030, un changement pro­fond est opéré. Le DIY (Do It Your­self, ou « fait main » en bon fran­çais) est présent à tous les échelons de l’économie. « La relocalisation, anglicisme que l’on pourrait tra­duire comme réimplantation locale des activités à laquelle on a ajouté une notion de durabilité est adoptée par le plus grand nombre » annonce l’intervenant. Un changement pro­fond des mentalités, des pratiques qui passent par la sobriété, la frugalité et grâce à qui l’homme se porte mieux, beaucoup mieux d’après Yannick Roudaut.

Et les coopératives ? 

Modifier les pratiques. Les gérants de coopératives qui sont aussi des éleveurs savent que c’est impératif. Le réchauffement climatique néces­site des changements. « Et nos ou­tils de transformation laitière dans ce scénario ? Ils ont sans doute des transformations à opérer mais ils ont aussi des points forts ? » interroge Alain Mathieu, président du comité interprofessionnel du comté (CIGC). « Vos outils coopératifs sont vos meil­leurs alliés pour relever les défis qui vous attendent. Ils sont liés au terri­toire, ont un ancrage fort grâce aux hommes et aux femmes qui les gèrent et qui vivent sur ce territoire. Les structures coopératives sont sources de diversité. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard qu’elles soient si présentes ici et qu’elles assurent la réussite de vos filières, elles aussi très ancrées au territoire » confirme et conclut Yan­nick Roudaut.

S. V.