Incendies
Autorités et secours se préparent à une nouvelle saison difficile

 L’été dernier, plus de 65 000 ha de forêts, broussailles et de champs ont été touchés par les incendies. La France est le quatrième pays européen le plus boisé. Ce qui en fait un territoire vulnérable au risque d’incendies de végétaux, qu’il s’agisse de forêts, de prairies ou de friches. Les dépar­tements du Jura et de l’Ardèche en ont particulièrement fait les frais. Zoom sur les dispositifs mis en place pour limiter la propagation du feu lors de la saison à venir.

Autorités et secours se préparent à une nouvelle saison difficile

 Du bassin d’Arcachon à la Normandie, en passant par le Jura et l’Ardèche, les images de flammes dévastant la nature ont marqué tous les esprits l’été dernier. L’Ardèche a connu un bien triste record. Ce territoire composé à 67 % de forêts a vu 110 feux se déclarer et 2 240 ha de terrains brûlés dans le sud du département. La sécheresse historique de ces territoires a favorisé l’expansion des feux sur la pinède, la broussaille et la garrigue, identifiées comme des essences vulné­rables. Sur place, plus de 500 sapeurs-pompiers venant de nombreux départe­ments du Sud-Est de la France avaient été déployés pour circonscrire les feux. Des moyens conséquents, mais loin d’être suffisants.

2 600 sapeurs-pompiers prévus en Ardèche

« Pour la sécurité civile, le gros enjeu est la préparation de la saison des feux de forêts, a déclaré ce lundi 22 mai le préfet de l’Ardèche, Thierry Devimeux. Le stress hydrique est bien là, les niveaux de nos rivières sont bas, la réserve en eau est faible et le risque de feux de forêt est important. Nous nous préparons pour une saison difficile. » Le dispositif dé­partemental de prévention et de lutte contre les incendies a ainsi été ren­forcé dès le week-end de Pâques et jusqu’en septembre. Dorénavant, 2 600 sapeurs-pompiers volontaires peuvent être déployés, la tour de guet de la Tour de Brison qui permet de détecter les départs de feux, ainsi que 10 caméras sont également prévues. Depuis 2007, le département s’est doté d’une cellule d’information et de contrôle du débrous­saillage obligatoire. Son objectif ? Sen­sibiliser une trentaine de communes par an et accompagner les élus dans l’application de la réglementation. Autre mesure forte, déjà instaurée l’année der­nière : les contrôles des zones de bivouac des gorges de l’Ardèche seront mainte­nus afin de faire respecter les arrêtés d’interdiction de feux et de consom­mation d’alcool. Enfin, la préfecture a récemment inauguré un projet expéri­mental de récupération d’eau de pluie d’une capacité de 120 m² à la caserne de Saint-Félicien. « Pour être indépendant et sécuriser les feux de forêt, nous avons besoin de revenir à cette méthode, c’est une piste sur laquelle nous travaillons dans le cadre des Assises de l’eau », a détaillé le préfet, avant de confier qu’une autre piste de réflexion serait d’utiliser des réserves d’eau privées agricoles.

Agriculteurs et les secours jurassiens coopèrent

L’eau n’est pas l’unique ressource qui puisse servir aux secours. L’été dernier, plus de 1 050 ha ont brûlé sur trois feux distincts à Cernon, Cornod et Montlain­sia, dans le Jura. Au total, entre le 9 et le 14 août 2022, 39 départs de feu ont été recensés. Une première pour ce département très boisé. Dès le début, les soldats du feu ont été épaulés par les agriculteurs venus nombreux avec leur matériel. Parmi eux, Kevin Gros, éleveur à Bellecombe. « Nous avons été prévenus par un copain qui a lancé un appel pour une tonne à eau équipée d’un canon », explique-t-il. Installé en Gaec familial, Kevin et son frère se sont rendus sur les incendies, tandis que son père et son oncle s’occupaient de la traite des vaches. Au total, 180 agriculteurs se sont mobilisés sur les trois incendies. « Ils sont arrivés spontanément et ont inondé en prévention pour que les sapeurs-pom­piers puissent attaquer le feu », a relaté le préfet du Jura, Serge Castel. D’autres agriculteurs ont pioché dans leur ré­serve d’eau pour remplir directement les bassines des secours. Soit un gain de temps considérable. Cette mobili­sation inédite a donné naissance à un groupe de travail entre la préfecture, les services de secours et les agriculteurs, afin d’intégrer au mieux ces derniers dans la chaîne opérationnelle. Le préfet l’a même assuré : chaque agriculteur mobilisé l’année dernière recevra une indemnisation de 1 000 euros, en lien avec la chambre d’agriculture. Les ser­vices de l’État et les secouristes savent que le risque d’incendie sera élevé pour la saison à venir. « Le Jura est un terri­toire de forêts », rappelle Serge Castel. Ce dernier a donc fait intégrer le risque feux de forêt aux communes du départe­ment les plus vulnérables, ainsi qu’une cartographie des zones sensibles, bien­tôt prête à être diffusée. L’été dernier, quatre canadairs et deux hélicoptères bombardiers d’eau sont intervenus sur le département. De tels moyens aériens n’avaient encore jamais été déployés. Dix hélicoptères bombardiers d’eau privés basés ailleurs sur le territoire seront prêts à intervenir dès le mois de juin. De son côté, le SDIS sera doté de 1500 sapeurs-pompiers. Mais le préfet le concède : « cela tient beaucoup sur les volontaires, il faut donc que les entreprises tolèrent que ces personnes s’absentent ». Quatre camions-citernes supplémen­taires de 4 000 à 6 000 litres rejoindront la flotte déjà existante, portant à neuf le nombre de véhicules disponibles. « Mais il faut attaquer les feux qui se déclarent au plus tôt, a tenu à prévenir le colonel Jacquin. Nous devons avoir des moyens aériens plus tôt que l’année dernière, où ces derniers sont arrivés quarante heures après le début des incendies. » Le préfet a également précisé qu’il n’hésiterait pas à fermer l’accès aux massifs, en cas de danger pour les habitants et les touristes.

L.R. et S.C.