Bleu de Gex
Quels mots pour faire décoller la consommation ?

Confrontés à une stagnation de la production à 500 tonnes par an depuis des décennies, les responsables du syndicat de défense du bleu de Gex s'interrogent sur les moyens à mettre en œuvre pour faire véritablement décoller cette production.
Quels mots pour faire décoller la consommation ?

Il n'y a guère qu'à Septmoncel que l'on parle, aujourd'hui encore, de « bleu de Septmoncel »... Plus loin, ce bleu qui fait la réputation du Haut-Jura est plus répandu auprès des consommateurs sous le vocable de « bleu de Gex ». Et pourtant, c'est bien à Septmoncel que s'est déroulée la dernière assemblée générale du syndicat interprofessionnel de défense du bleu de Gex.

Un brin nostalgique, Raphaël Perrin, le maire du village a, ce jour-là, évoqué sa propre enfance, « baignée dans le bleu ». La belle époque où la commune qu'il administre aujourd'hui, a compté jusqu'à quatre fruitières ! Quatre, le chiffre est lâché : c'est celui du nombre d'ateliers qui, sur tout le secteur de cette AOP à cheval sur les départements du Jura et de l'Ain, fabriquent encore ce fromage à pâte persillée.
Dans la vitrine des AOP jurassienne, le « Gex » tient sa place, à l'ombre de ses voisins plus connus que sont le morbier et le comté. 500 tonnes produites par an : c'est cent fois moins que la production de comté. Et ce chiffre de 500 tonnes, le bleu de Gex n'arrive pas à en décoller depuis deux ou trois décennies. Ce malgré toute la bonne volonté et tous les efforts consentis par son interprofession.
Président des débats lors de l'assemblée de Septmoncel, Alain Monnet ne le cache pas : « La croissance en volume n'est pas une fin en soi mais nous ne pouvons pas nous satisfaire de cette stagnation de la production et des ventes dans un contexte pourtant porteur pour les autres fromages AOP du Massif jurassien. Notre filière ne compte que quatre ateliers et c'est la bonne santé de chacun qu'il importe de préserver... »

 

Mais comment décoller ?


Alors, quels outils actionner, quelles actions mettre en place pour donner ce déclic que chacun appelle de ses vœux ?
Alain Monnet regrette d'abord la faiblesse de la formation des producteurs sur la qualité du lait et l'optimisation des résultats technico-économiques : « Le travail s'est avéré fructueux, permettant aux producteurs d'apprendre et de progresser sur leurs propres exploitations. Mais ces producteurs n'étaient guère plus nombreux que la demi-douzaine ! »
L'appui technique du CTFC est précieux. La rénovation du service apporté aux fromagers avec de nouvelles méthodes de gradage et la mise en place d'une fromathèque permettent d'améliorer régulièrement les qualités des fabrications. Et des leviers sont identifiés pour poursuivre les améliorations sur certains défauts persistants.
La Fête du bleu est désormais un élément fédérateur pour toute la filière qui trouve ici une belle opportunité de promouvoir son produit. La prochaine édition se déroulera le dimanche 30 juillet, à Septmoncel. Et la filière s'est rapprochée de deux AOP fromagères d'Auvergne Rhône-Alpes avec qui elle partage plusieurs points communs : la fourme de Montbrison et le bleu du Vercors. Un des points forts de cette mutualisation a été de renforcer la distribution des produits auprès du réseau des crémiers-fromagers. Un programme qui débute dès cette année.
A plus long terme, le syndicat du bleu de Gex réfléchit à une révision de son cahier des charges, à l'image des trois autres AOP fromagères de Franche-Comté qui ont engagé une révision de leurs textes pour renforcer un « ancrage nature » de leurs appellations. « Sur cette thématique environnementale, le bleu de Gex pourrait afficher sans effort un haut niveau d'exigence, explique le président : pas de produits phytosanitaires, un recours très limité aux engrais chimiques ou à l'affouragement en vert, des prairies multi-espèces, une part importante de pâturage... Nos atouts sont nombreux. L'enjeu c'est d'améliorer l'image du bleu de Gex auprès du consommateur, avec pour conséquence une amélioration de ses performances économiques... »
L'ambition est grande pour toute la filière ! Et le président et les siens sont bien conscients qu'il leur faudra désormais trouver les bons mots pour faire « décoller la consommation ». Et un petit avant-goût en a été donné en fin de séances, avec l'exercice de dégustation et d'analyse des goûts proposé par Florence Bérodier, la responsable « analyse sensorielle » du CTFC : « Le goût du bleu n'est pas que celui du pénicillium ou du lait. Il peut y avoir une multitude d'arômes qui vont évoluer en fonction de l'affinage... ». Des arômes à identifier, à qualifier, à mélanger et... à décrire !

 

M.R.