Une année globalement bonne

Conjoncture / La fermoscopie Jura et Doubs, ou sont présentés les résultats économiques agricoles, est toujours un moment fort pour CERFrance Alliance-Comtoise. Deux réunions d’information ont eu lieu cette année : le 16 novembre à Tourmont dans le Jura et le 18 à Epenoy dans le Doubs. Fil rouge de ces réunions : la présentation de la PAC 2023.

Une année globalement bonne

D’entrée, le président Claude Henriot a brisé le suspense : « Cet été, en préparant cette conférence, nous nous attendions au pire. Nous pensions présenter une campagne entachée par la météo et une PAC très défavorable aux systèmes viandes et céréales... Mais finalement, l’année 2021 sera bonne pour la grande majorité des systèmes présentés aujourd’hui. Enfin ! Et la PAC 2023 devrait permettre de conserver le niveau d’aide perçu par la plupart des exploitations. J’ai tout de même une pensée particulière pour les viticulteurs du Jura qui eux ont connu une année plus que mauvaise ».

Cette accalmie doit permettre aux agriculteurs de souffler, reconstituer leur trésorerie, rembourser les dettes et effectuer les investissements productifs repoussés depuis plusieurs années.

La réforme de la PAC, fruit de négociations entre états de mai 2018 à juin 2021, doit permettre un « verdissement en douceur ». Quelques ajustements sont encore possibles car la France a jusqu’à fin décembre pour présenter son plan stratégique à l’Union européenne. « Entre le premier pilier et le deuxième, nous nous attendions à une baisse des budgets mais le plan de relance est passé par là, » a expliqué le conseiller Patrick Vuitton. Au final, le premier pilier est quasiment stable avec une baisse de 2 % due à la convergence des aides et le second est conforté avec une augmentation de 7,4 % de l’enveloppe.

Cette PAC 2023 doit permettre un petit coup de pouce aux systèmes bio avec une enveloppe qui passe de 250 à 340 millions, soit une revalorisation de 36 % des aides, principalement à destination des exploitations en conversion. L’objectif de la France est de passer de 8,5 % à 18 % de la surface agricole en bio. Les aides JA sont aussi revalorisées et ne dépendent plus du nombre d’hectares.

Création des éco-régimes

Les aides couplées aux bovins (allaitants et laits) et aux protéines sont remplacées par une aide à l’UGB (Unité de gros bétail). Elles sont légèrement rognées mais en contrepartie le budget des aides protéagineuses sera augmenté.

Le DPB (droit à paiement de base) change de nom pour devenir l’aide de base au revenu. Il sera légèrement augmenté (+9%) mais son obtention sera plus exigeante car il faudra remplir les conditions de l’ancien DPB additionnées de celles du « paiement vert ». Pour avoir le même montant que les années précédentes, il va falloir en plus aller chercher les éco-régimes. Il existe trois voix pour accéder à ces nouvelles exigences environnementales : les pratiques agricoles (diversité d’assolement des terres arables et prairies permanentes), les certifications (bio, CE2+, HVE, etc.) ou les infrastructures agro-écologiques (haies, mares, bosquets, etc.). Ces voix sont diversifiées afin qu’un maximum de monde puisse y avoir accès. Deux niveaux de paiements seront possibles : le standard à  60€/ha et le supérieur à 82 €/ha. « Quand nous avons vu comment sont calculés les points pour l’obtention des éco-régimes, ça ne nous paraît pas compliqué d’aller chercher le niveau supérieur, » a précisé Patrick Vuitton. « Cette nouvelle PAC favorise nos départements car elle récompense nos pratiques agricoles vertueuses. »

Les grandes cultures : la météo 2021 a été plus fraîche que les années précédentes. Les semis ont pu se faire dans de bonnes conditions et les réserves en eau se sont reconstituées. Malheureusement, le gel sur une végétation précoce a pénalisé certaines cultures. Les températures inférieures aux normales de saison et la pluviométrie importante ont ensuite été propices aux risques sanitaires. Les fenêtres météos courtes n’ont pas facilité les récoltes. Au final, la quantité était au rendez-vous mais la qualité aléatoire.

Le produit à l’hectare des cultures d’automne est resté stable dans le Doubs et le Jura. L’augmentation des prix de vente a permis de compenser la baisse de rendement du blé, de l’orge et du colza. Pour les cultures de printemps, comme le maïs et le soja, la tendance est plutôt positive : les rendements sont meilleurs et les prix se sont envolés. En moyenne, 2021 a été la meilleure des neuf dernières années pour les grandes cultures malgré une augmentation des charges. Le résultat courant à l’hectare s’élève à 340 € et le total des produits est environ de 300 000 €, en augmentation de 13 %. L’EBE (excédent brut d'exploitation) est à 104 700 € (+46%). Ramené à l’unité de travail familiale (Utaf), le résultat courant s’élève à 38 300 €. La part des aides PAC dans cet EBE est de 43 %.

Les bovins allaitants : le Jura et le Doubs ne sont pas les secteurs les plus représentatifs malgré quelques exploitations qui produisent des bovins viande. Fait exceptionnel cette année, grâce à la météo, il n’y a pas eu besoin de leur donner du fourrage car les pâturages et la récolte ont abondé. Les prix sont en hausse, tirés par la demande allemande, de même que le poids des carcasses. Les circuits-courts pour la viande ont continué leur développement.

Le commerce de broutards était favorable mais l’offre limitée et les jeunes bovins ont souffert d’un manque de débouché. Le résultat moyen par unité de main d’œuvre est de 11 400 €. Les aides PAC représentent 118 % de l’EBE qui s’élève à 41 000 €, ce qui traduit une forte dépendance de la filière à ces aides.

Les bovins lait de plaine : comme pour les bovins allaitants, la conjoncture est favorable : la durée de pâturage a été plus longue et les stocks fourragers ont pu être reconstitués. Le volume de lait produit a atteint un plancher historiquement bas en 2021. Cette baisse initiée il y a plusieurs années s’explique par des unités de production non reprises, des conversions AOP mais aussi par la qualité des rations hivernales de 2020. Les laiteries de la région ont proposé davantage de produits à haute valeur ajoutée tel que le lait local ou oméga 3. Le produit global moyen est de 407 000 € et l’EBE de 120 000 € dont 50% d’aides. Le résultat courant par Utaf de 29300 €.

Les bovins lait AOP massif jurassien : les prix du lait AOP sont toujours robustes grâce aux cahiers des charges qui restent de bons outils pour maîtriser le marché. Les volumes collectés et le prix de vente du lait sont à la hausse (610 € pour 1000 litres contre 580 en 2020). Le résultat courant moyen s’établit à 306 300 € avec un EBE de 122 500 € (dont 37 % d’aides), en progression de 5000 € par rapport à 2020. Finalement, le résultat courant par Utaf atteint 29 500 €. Il est à noter que ce résultat est en progression régulière depuis 10 ans.

S.C.

Claude Henriot, actuel président de CERFrance Alliance Comtoise, participait à sa dernière présentation de fermoscopie car il ne souhaite pas briguer de nouveau mandat.