Zones vulnérables : l'Etat en remet une couche !

Le bassin Rhône-Méditerranée vient de mettre en consultation une proposition de nouvelle cartographie des zones vulnérables. La région Bourgogne Franche-Comté est très impactée par ce nouveau classement et le Jura n’échappe pas à l’extension de la zone au grand désarroi de la FDSEA.

Zones vulnérables : l'Etat en remet une couche !

Alors que la dernière révision des zones vulnérables aux nitrates datait d’il y a 3 ans à peine, les agriculteurs auraient pensé avoir un peu de répit. L’Etat en a décidé autrement en réalisant des analyses d’eau souterraines et superficielles régulièrement un peu partout dans les différents bassins. Sans aucune concertation avec les acteurs économiques, les collectivités du territoire et les utilisateurs de l’eau, la DREAL épaulée par l’Office français de la biodiversité a décidé d’ajouter 76 nouvelles communes jurassiennes aux zones vulnérables à compter de juillet 2021, pour un total de 102 communes dans le département. A l’heure de la démocratie participative, rassurons-nous la consultation avec la profession et les élus n’a pas été oubliée puisqu’elle aura lieu pendant deux mois, maintenant que les dés sont jetés… La liste définitive sera établie après cette phase où le syndicalisme majoritaire sera mobilisé, mais il faut bien l’admettre avec peu de marges de manœuvre étant donné le procédé de classement. Rappelons que pour être vulnérable aux nitrates, deux critères sont étudiés. Premier critère historique, le taux de nitrate dans les eaux souterraines en lien avec sa potabilité. Des points d’analyse sont donc réalisés dans des puits représentatifs de grandes masses d’eau souterraines et le seuil de 40 mg/l ne doit pas être dépassé sachant que la non-potabilité est atteinte à partir de 50 mg/l de nitrates. Le second critère, beaucoup plus discutable tant la véracité scientifique des seuils reste à prouver, est le taux de nitrate dans les eaux de surface. Ainsi, des analyses de ruisseaux et cours d’eau sont prélevées par l’OFB pour vérifier que le seuil de 18 mg/l de nitrate n’est pas franchi.

En moyenne le Jura est bon

Parmi les cours d’eau dans le viseur, notons du nord au sud : l’Ognon avec des prélèvements à Courchapon et Pesmes, le Gravellon avec des prélèvements à Thervay, l’Arne avec des prélèvements à Lavans-le-Dole, la Saône avec des prélèvements à Auxonne et Charrey-sur-Saône entre autres, l’Ausson avec des prélèvements à Franxault, la Sablonne avec des prélèvements à Annoire, la Grozonne avec des prélèvements à Neuvilley, la Rondaine avec des prélèvements à Relans, le Serein avec des prélèvements à Arlay, le Sedan avec des prélèvements à Villevieux, et enfin le Bief Turin avec des prélèvements à Domsure dans l’Ain. 72 communes du Jura sont concernées par les bassins versants de ces petits ou grands affluents du bassin Rhône Méditerranée. Des découpages de bassins qui d’ailleurs semblent très contestables d’après la FDSEA du Jura qui envisage de demander une expertise à un hydrogéologue expert en masses d’eau. Lorsque l’on regarde les chiffres des analyses en moyenne, plus que 4 de ces 11 cours d’eau se trouvent au-dessus des 18 mg/l de nitrate, mais la méthode de classement retenue par la DREAL est celle du percentile 90 (min 10% des analyses au-delà de 18 mg/l). D’un point de vue plus générale, soulignons que les niveaux de nitrates dans les cours d’eau jurassiens sont bons quoi qu’en disent les détracteurs de l’agriculture et de la filière comté. Quelques exemples de données moyennes aux quatre coins du département : 9.7 mg/l dans la Seille, 9.7 mg/l dans le Suran, 6.6 mg/l dans le Doubs, 7.3 mg/l, dans l’Orain, 6.8 mg/l dans la Loue, 7.2 mg/l dans la Valouze, 7.5 mg/l dans la Serpentine, 5.2 mg/l dans l’Ain, 6.7 mg/l dans la Furieuse, 2.5 mg/l dans la Bienne…

Point noir à Evans

Concernant les eaux souterraines, jusqu’à présent le Jura était épargné des problèmes de nitrates dans les puits de captage. Les analyses réalisées également sur les différentes masses d’eau du sous-sol sont elles aussi très encourageantes et démontrent que les agriculteurs sont responsables dans leurs pratiques malgré des sols karstiques. Cependant, deux analyses dépassent le seuil de 40 mg/l sur la masse d’eau des calcaires jurassiques des Avants-Monts. Les points noirs sont à Evans avec un prélèvement à 58.6 mg/l et dans une moindre mesure à Dole avec un prélèvement à 41 mg/l. Ces résultats entraînent 50 communes, dont une vingtaine déjà concernées par le classement via les eaux de surfaces, en zone vulnérable. Là également, le découpage de cette masse d’eau interroge tant elle se chevauche avec celle des alluvions de la vallée du Doubs qui pour le coup a des résultats aux alentours de 13 mg/l.

 

carte zone vulnérable

Des contraintes supplémentaires

Ce nouveau zonage entraîne évidemment des contraintes supplémentaires pour les agriculteurs concernés. La première de ces mesures est l’interdiction de l’épandage des fertilisants organiques ou minéraux à certaines périodes de l’année, où les risques de lessivage sont importants. Les dates varient selon les types de fertilisants mais cela peut avoir un réel impact sur la gestion des effluents des exploitations. En particulier dans la filière comté où la règle des 200 °C va également entrer en application avec le nouveau cahier des charges de la filière. La seconde mesure concerne les capacités de stockage des effluents d’élevage allant de 4 à 6.5 mois selon les systèmes. La troisième mesure concerne la fertilisation azotée avec le fractionnement et le plafonnement des apports d’azote. La limitation des apports d’azote dans les zones, où le programme d’action nitrate s’applique depuis de nombreuses années, a déjà pour conséquence la baisse des taux de protéines dans les céréales cultivées dans la région. La perte de valeur ajoutée pour les productions végétales risque d’être bien réelle pour les céréaliers du département. La quatrième mesure concerne la planification et l’enregistrement de la fertilisation à travers des documents obligatoires comme le plan prévisionnel de fumure et le cahier d’enregistrement des pratiques. La cinquième mesure concerne les distances d’épandage par rapport aux cours d’eau ainsi que les conditions d’épandage par rapport aux sols détrempés, inondés, enneigés ou gelés. La sixième mesure concerne la présence de couverts végétaux pour limiter les fuites d’azote au cours de périodes pluvieuses via des intercultures courtes ou longues. Notons que le programme d’actions régional permet des dérogations pour certaines cultures lorsque les îlots culturaux justifient d’un taux d’argile supérieur ou égal à 40%. La dernière mesure concerne la présence de bandes enherbées permanentes le long des courts d’eau et plans d’eau de plus de 10 hectares.

PE Brunet

Zones vulnérables 2021 en consultation
Liste des communes concernées


Nouvelles communes : Abergement-la-Ronce, Abergement-le-Grand, Abergement-le-Petit, Archelange, Arlay, Audelange, Aumont, Authume, La Barre, Baume-les-Messieurs, Baverans, Biarne, Bletterans, Brainans, Brevans, Briod, Champvans, Châtenois, Chevigny, Chille, Choisey, Courtefontaine, Dammartin-Marpain, Damparis, Dampierre, Desnes, Dole, Domblans, Éclans-Nenon, L’Étoile, Évans, Foucherans, Fraisans, Frasne-les-Meulières, Grozon, Jouhe, Larnaud, Lavigny, Lombard, Le Louverot, Monnières, Montain, Monteplain, Montholier, Montmirey-la-Ville, Montmirey-le-Château, Montmorot, Mutigney, Les Trois Châteaux, Neuvilley, Oussières, Pagney, Pannessières, Peintre, Perrigny, Le Pin, Plainoiseau, Pointre, Quintigny, Rainans, Ranchot, Rans, Relans.

Communes classées en 2017 et maintenue : Amange, Annoire, Aumur, Auxange, Champdivers, Chemin, Gendrey, Gevry, Lavangeot, Lavans-lès-Dole, Longwy-surle-Doubs, Louvatange, Malange, Orchamps, Ougney, Peseux, Romain, Romange, Saint-Aubin, Saint-Loup, Saligney, Sermange, Serre-les-Moulières, Tavaux, Thervay, Vriange.

Communes proposées au déclassement : Brans, Molay, Offlanges.