Engagement des femmes en agriculture
« Modernité et ruralité peuvent se conjuguer »

Après la session de chambre, une table ronde sur l’engagement des femmes en agriculture était organisée. L’idée de ce débat, proposée par Isabelle Bailly, vide présidente de la chambre d’agriculture et présidente de la commission agricultrice à la FDSEA 39, fait suite à la visite en avril 2023 d’Isabelle Lonvis-Rome, ministre déléguée à l’égalité hommes-femmes.

« Modernité et ruralité peuvent se conjuguer »

Si le mot agricultrice n’existe que depuis 1961, jusqu’en 1980 moins de 9% des exploitants agricoles étaient des femmes. Aujourd’hui, elles représentent un tiers des installations, principalement en élevage ovin-caprin et en viticulture, les femmes restant sous-représentées en bovins et en grande culture. Pourtant, au niveau des formations, la parité est presque parfaite même si des différences importantes existent selon les filières. 62% des élèves ingénieurs agro et 80 % des étudiants vétérinaires sont des femmes.

Pour Stéplanie Deblaere, déléguée départementale aux Droits des Femmes et à l'Égalité, le Jura est « exemplaire » sur de nombreux postes à responsabilités. « C'est la preuve que modernité et ruralité peuvent se conjuguer. Quand la parité et la mixité seront réelles, nous n’aurons plus besoin de quotas. Pour le moment, les femmes doivent se battre mais ça va devenir naturel ».

La présidente de la Caisse régionale du Crédit Agricole Franche-Comté, Christine Grillet, est intervenue en vidéo. Elle a fait le choix de s’impliquer, d’abord dans CERFrance puis à la chambre d’Agriculture et au Crédit Agricole, car elle a vu l’utilité de la réflexion collective. « Les quotas ont favorisé l’entrée des femmes. L’accueil a été bienveillant et je me suis épanouie dans tous ces mandats et ai beaucoup appris. Vous avez des atouts, ayez confiance, osez cet engagement ! »

Isabelle Bailly se souvient que, quand au collège, dans les années 80, elle a écrit que sa maman était agricultrice, le prof lui a demandé d’effacer car ce métier n’existait pas. « Depuis, le chemin parcouru est énorme, » reconnaît-elle. Isabelle a commencé par suivre son mari aux JA, puis à la FDSEA. « Je participais volontiers aux corvées, » raconte-t-elle. « Quand la parité est arrivée en 2012, j’ai été approché pour faire partie de la liste chambre d’agriculture. Ce n’était pas très délicat, on ne me l’a demandé que parce qu’il fallait des femmes sur les listes, j’ai depuis dû faire mes preuves. Je me pose souvent la question de ma légitimité et de savoir si j’ai suffisamment de charisme pour faire les choses ». Pour elle qui reconnaît parfois bousculer les lignes, les femmes apportent de la complémentarité et un autre regard.

Conduire les tracteurs

Angélique Colombat, présidente de Soelis emploi partagé et membre du bureau des JA 39, a choisi de s’engager pour répondre à des questions qu’elle se posait. « C’est facile de juger mais il faut aller voir pour comprendre. On peut influencer, faire partie des prises de décisions, c’est accessible, même au niveau régional ou national. On a l’impression que toute les places sont prises mais non. Grâce aux quotas, les portes sont ouvertes ». Sur l’exploitation, elle revendique les mêmes activités que son conjoint : « Je ne veux pas me contenter de traire, de m’occuper des veaux et faire les papiers, je veux tout faire, autant de tracteur que lui ! »

Morgane Fillod, étudiante au lycée de Montmorot, est entrée aux JA du canton Petite-Montagne pour suivre son frère. Elle souhaite terminer ses stages avant de s’engager plus, peut-être au sein de sa coopérative. Pour elle, les femmes comme les hommes doivent faire leurs preuves. Aucun domaine n’est réservé à l’un ou à l’autre : « Ce n’est pas parce que je suis une femme que je ne ferai pas de tracteur, que je ne prendrai pas de décision ! »

S.C.