AOP Morbier
Une bonne année malgré les difficultés

Le syndicat interprofessionnel du Morbier avait donné rendez-vous à ses adhérents mardi 9 avril à la salle du Temps Libre à Censeau pour son assemblée générale. Malgré une conjoncture morose et les contaminations sanitaires de l’automne dernier, l’AOP conserve son dynamisme.

Une bonne année malgré les difficultés
Bureau : (de gauche à droite) Frédéric Ferreux, trésorier de l’AOP Morbier, Frédéric Lacroix, vice-président, Joël Alpy, président et Eric Chevalier, vice-président.

Joël Alpy, président de l’AOP Morbier, est revenu sur l’année 2023 marquée par un contexte général difficile. L’inflation a poussé les consommateurs à réorienter certains actes d’achat, notamment au détriment des fromages AOP. Malgré cette conjoncture morose, les chiffres du Morbier ont bien résisté puisque si les volumes des ventes restent quasiment stables, les prix ont augmenté de 11 %.

« Une enquête conduite au printemps a montré que les entreprises croient au Morbier, » se réjouit Joël Alpy. « C’est un fromage AOP répondant bien aux attentes du marché, avec différentes gammes de Morbier. Sa notoriété a augmenté et son image s’est améliorée. Sa rentabilité s’est accrue. Les investissements récents et les projets existent dans la plupart des entreprises de la filière ». Un dynamisme qui a permis à deux nouveaux ateliers d’être habilités l’an passé. Deux autres, dont un atelier fermier, devraient l’être en 2024.

Face à cette maturité commerciale, les principaux opérateurs de la filière n’estiment pas nécessaire de réactiver le dispositif des Règles de Régulation de l’Offre en Morbier. Les fabrications opportunistes de fin de campagne laitière, qui avaient justifié la mise en place de ces RRO Morbier en 2017, ne semblent plus d’actualité, la production étant en phase avec le marché.

 

Garantir la sécurité alimentaire

Pourtant la fin de l’année a été compliquée pour le Morbier avec des cas de contaminations par la bactérie E.Coli STEC touchant de jeunes enfants.  Des rappels de fromages sont intervenus rapidement. « Nous avons d’abord pensé à ces enfants et à leurs familles dans l’inquiétude, » relate le président. « L’application stricte du plan de contrôle de la filière est un passage obligatoire pour garantir la sécurité alimentaire du Morbier. Nous sommes déterminés à faire appliquer ce protocole. Un écart individuel fragilise le collectif. »

Les audits sanitaires de tous les ateliers ont repris et un plan de formation de tous les producteurs est mis en place fromagerie par fromagerie. Sept ont déjà eu lieu, animées par un vétérinaire du GTV, un technicien d’élevage du CTFC et un représentant du syndicat. Ces formations se déroulent en deux temps. La matinée est consacrée à la théorie sur la bactérie, ses conséquences sur la santé et ses résultats en filière Morbier. Durant l’après-midi, les éleveurs sont amenés à réfléchir sur les mesures à mettre en place pour avoir les vaches les plus propres possibles avant la traite et sur celles pour limiter le passage des STEC dans le lait. Chaque éleveur crée ainsi son propre plan d’action adapté à sa ferme.

« Les éleveurs sont mobilisés et se sentent concernés par le risque STEC, » précise le vice-président de la filière Eric Chevalier. « Ne tardez pas à faire cette formation, c’est important vis-à-vis de la qualité du produit et de son image. N’attendez-pas d’être au pied du mur ! »

Le syndicat prend en charge 50 % du coût de cette formation. « La qualité sanitaire demeure notre priorité absolue et les efforts pour prévenir les risques seront poursuivis, » précise Joël Alpy. « L’augmentation de la valeur du Morbier permet de faire face aux coûts élevés d’analyse, de destruction, de recherche, de formation... »

Public : Les éleveurs sont mobilisés contre le risque STEC et invités à faire des formations.

« L’éleveur connaît chacune de ses vaches »

Parmi les dossiers d’actualité évoqués lors de cette AG, la révision du cahier des charges de l’AOP entre dans sa dernière ligne droite. Le syndicat espère une validation de l’ensemble du dossier au mois de novembre. Resteront ensuite la phase de consultation publique et la procédure de validation européenne. Ce projet renforce la place du pâturage et des prairies permanentes, limite la fertilisation azotée, met en place des plafonds pour que les systèmes fourragers soient plus résilients, etc. Pour le président de l’AOP, ce nouveau cahier des charges « conforte une agriculture à taille humaine, où l’éleveur connaît chacune de ses vaches. C’est un pari pour renforcer nos spécificités, renouveler la confiance du consommateur, gagner en qualité et aller chercher de la valeur ».

En 2022, le Morbier avait, après des années de procédure, remporté une victoire juridique reconnaissant que son aspect distinctif, avec sa célèbre raie sombre, était protégé par l’AOP. Une copie de Morbier reproduisant ce trait avait été interdite à la vente. Depuis, 38 autres imitations de Morbier, empruntant soit son nom, soit sa signature visuelle, ont été recensées. Fort de cette jurisprudence, l’interprofession ira en justice à chaque fois si aucun accord à l’amiable n’est trouvé.

 

S.C.