Fromage AOP
« Pour que le Bleu de demain soit en cohérence avec celui des anciens »

L’assemblée générale du Bleu de Gex a été l’occasion de présenter la révision du cahier des charges de cette AOP. Interdiction du robot de traite, plafonnement de la production de lait, limitation des apports, culture de couverture l’hiver… La plupart des critères proposés reflètent déjà les pratiques actuelles. Afin de maintenir une production à la hausse, de nouvelles communes du Jura et de l’Ain devraient intégrer la zone AOP.

« Pour que le Bleu de demain soit en cohérence avec celui des anciens »

« Renforcer le cahier des charges n'a pour objectif ni de figer les choses, ni de renoncer au développement ou au progrès. C'est un pari pour l'avenir, pour la valorisation… Un pari pour cultiver l’adhésion des consommateurs et de notre environnement, une source de fierté et de développement, » a rappelé Nicolas Cannelle lors de son rapport moral. « C’est l’occasion de préciser qui nous sommes, d’où nous venons et comment nous travaillons. Pour que le Bleu tire toujours sa spécificité de son terroir, pour que le Bleu de demain soit en cohérence avec celui des anciens. »

Trois axes sont concernés par cette révision en adéquation avec le cahier des charges des autres AOP du massif : l’environnement, la taille des exploitations et la fabrication artisanale. « Certaines modifications sont des évidences, mais nous préférons les noter pour éviter d’éventuels abus, » poursuit le président du syndicat.

Les prairies permanentes devront représenter au moins 80% de la surface fourragère des exploitations et leur destruction chimique sera interdite (exception faite des adventices localisées). L’apport total d’azote sera limité à 120 unités par hectare et par an et ceux en azote minéral à 20 unités par an en moyenne (contre 35 actuellement). Trois épandages de fumure organique seront autorisés annuellement après lesquels pâturage et fauche seront interdits pendant 30 jours. L’hiver, les sols devront être couverts et tout épandage sera interdit sur la neige ou lorsque la terre est gelée.

Eviter l’intensification

Les exploitations devront produire du lait toute l’année. Le troupeau doit être de race Montbéliarde ou Simmental, ou croisement des deux races. La certification de parenté bovine sera obligatoire. Les vaches devront majoritairement être nées et élevées sur l’exploitation et, en cas d’achat, devront provenir d’une ferme habilitée pour une ou plusieurs AOP du massif jurassien.

Pour éviter des niveaux d’intensification incompatibles avec le produit, la productivité sera limitée à 3 500 litres de lait par hectares. La superficie fourragère exploitée devra être au minimum égale à 1,5 hectare par vache laitière et chaque exploitation sera limitée à une production de 1,2 million de litres de lait par campagne, chiffre commun aux 4 AOP.

Concernant l’alimentation, 50 ares de surface fourragère par vache laitière devront être accessibles dans un rayon de 1,5 km autour du point de traite. L’affouragement vert sera limité à 75 jours par an. Le maïs distribué en vert sera interdit et les compléments alimentaires, à base de céréales ou de tourteaux, autorisés à hauteur maximum de 1800 kg par animal et par an.

Pour lever toute ambiguïté, il sera stipulé que le robot de traite est interdit.

Extension de la zone AOP

Pour palier aux limitations par exploitation tout en continuant d’augmenter la production totale, plusieurs communes devraient rejoindre la zone AOP Bleu de Gex. Sont concernées celles dont le paysage est maillé de prairies et de conifères, typiques du Jura et de l’Ain et ou il existe des preuves historiques de fabrication passée :  Brénod, Les Neyrolles, Bellefontaine, Bois d’Amont, Les Rousses, Les Crozets, Etival, Haut-de-Bienne, Morbier, Leschères, Foncine le Haut et Foncine le Bas. Des réflexions sont encore en cours pour Ravilloles, le coteau du Lizon, Haut-Valromey, Ruffieu et Lompnieu.

« Nos filières se complètent, cette synergie nous réussit à tous, » estime Alain Mathieu, président du CIGC. « Les révisions de nos appellations, gage de qualité, leur permettront de se démarquer pour que les consommateurs acceptent de payer un prix rémunérateur. Nous créerons de la valeur tout en ayant la fierté de faire de bons produits. »

A l’issue de l’AG, ce nouveau cahier des charges a été adopté avec 18 votes pour, un vote contre et deux abstentions. D’ici cet été, la proposition de zone sera finalisée, le dossier sera rédigé et déposé auprès de l’INAO qui constituera une commission d’enquête et un groupe d’experts en charge de l’étude pour des premières visites sur le territoire de l’AOP courant 2023.

S.C.

Le Pérachu officialisé

Le Bleu de Gex doit être affiné au minimum durant 21 jours. Le nouveau cahier des charges stipule qu’après 50 jours, le fromage peut également utiliser l’appellation « Pérachu » ou « Perassu », nom traditionnel des Bleus très affinés.

Il se distingue par sa pâte plus foncée et plus compacte, aux zones blanches quasiment absentes. Son goût est intense, persistant et soutenu par des saveurs dont l’équilibre change : plus salé mais sans excès, moins amer, voir légèrement sucré. Il repose sur des notes de champignons plus avancées, de sous-bois moussu et selon les fromages, de torréfié, de cuir mouillé et de minéral.