Si la courte fenêtre de temps sec du 10 au 14 mai a permis aux agriculteurs d’effectuer une bonne partie des semis de maïs, et de récolter des foins déjà bien mûrs, les inquiétudes persistent pour la réalisation de stocks fourragers en vue de l’automne-hiver 2024.
Les conditions climatiques depuis début 2024 sont assez semblables à 2001, en termes de cumuls de degrés-jours (base 6-30°C) et de précipitations. Cette année-là, les cumuls de précipitations avaient été supérieurs aux normales saisonnières jusqu’en septembre… mais l’automne avait été sec et frais. Ces conditions compliquent nombre d’opérations culturales d’implantation des cultures de printemps, dont le maïs destiné à l’ensilage : certaines parcelles sont d’ailleurs toujours impraticables… « La Bresse, le val de Saône inondable, la Haute-Saône, le Doubs et le Territoire de Belfort restent les zones les plus en retard. », notent les auteurs du bulletin régional de santé du végétal.
80% de la sole de maïs a été semée
Après des semis éparpillés sur le mois d’avril, une surface importante a été semée entre le 10 et le 14 mai. Le temps sec et chaud de la semaine dernière a enfin permis le ressuyage des parcelles et la reprise des semis de maïs. Mais les semis ne sont pas terminés pour autant. « Environ 20% des semis restent à réaliser, estime Emeric Courbet, spécialiste des grandes cultures à la Chambre d’agriculture de Haute-Saône : c’est le cas notamment des semis qui étaient prévus derrière une culture intermédiaire à vocation énergétique, dont il a fallu attendre le ressuyage pour la récolte. Le créneau a été trop court pour réaliser le semis ensuite. » Il sera peut-être nécessaire de changer de groupe de précocité variétale pour s’adapter à un cycle végétatif plus court, et atteindre un degré de maturité suffisant à l’automne. Il faut 1350°C base 6 pour récolter en ensilage un maïs précoce d’indice 200.
Et 1700°C base 6 pour le récolter en grain, prévoir du séchage !
Aussi, alors que les premiers semis de maïs réalisés le 13 avril atteignent le stade 4 feuilles, certaines parcelles restent encore à emblaver en grain, notamment sur les secteurs hydromorphes ou les plus arrosés.
Les précipitations localement abondantes qui ont suivi ce court répit soulèvent des inquiétudes. « On a des cas de ruissellement important qui ont bouleversé les lignes de semis », observe Emeric Courbet, photos prises dans le secteur de Charcenne à l’appui. En outre, ces cumuls importants sur des sols déjà proches de la saturation peuvent faire ressortir des symptômes d’excès d’eau, en particulier sur les secteurs hydromorphes ou les sols tassés superficiellement par un travail du sol réalisé en conditions humides. Pour les parcelles concernées, il est très probable que des manques de pieds soient observés par la suite : le stade le plus sensible à l’excès d’eau est la germination, qui peut être arrêtée en cas d’anoxie (manque d’oxygène dans le sol) et engendrer la perte du pied. A ce stade, le pronostic est en général pessimiste après 48h d’ennoiement continu. Un diagnostic de la situation sera à effectuer pour éventuellement ressemer les zones touchées, afin d’éviter l’enherbement de la parcelle. Pour les parcelles levées, l’excès d’eau est assimilable à une sécheresse en pénalisant l’absorption des éléments nutritifs. Cela se manifeste en général par l’apparition de carences induites sur les jeunes maïs au moment du sevrage (4-5 feuilles), avec des cas de rougissement (phosphore) ou des jaunissements selon les parcelles et les génétiques implantées. Ces stress pourront être levés en cas de retour de conditions plus chaudes, poussantes, et de sol réessuyé.
Forte pression limaces
Les conditions humides sont toujours favorables aux attaques de limaces. Le risque est actuellement toujours important. « Des attaques parfois très importantes sont notées, dans deux parcelles du réseau d’observation. », relève aussi le BSV. Une surveillance des parcelles s'impose dès le semis et jusqu'au stade 5-6 feuilles du maïs, en particulier dans les situations à risque : préparations de sol grossières, présence de résidus de culture en surface ou intercultures détruites tardivement, bordures de bois et haies, parcelles régulièrement sujettes à des dégâts de limaces. « Privilégiez les protections avec des produits de biocontrôle à base de phosphate ferrique qui ont une efficacité équivalente aux produits phytosanitaires. », préconisent les experts régionaux.
Les corvidés sont le plus souvent présents dans les zones avec des refuges à proximité (bois, grands arbres, nidification dans les parcs ...). Ils n’apprécient pas d’être dérangés. Ainsi, les parcelles les plus à risque sont celles où la présence humaine est moindre (grandes parcelles, parcelles en hauteur avec vue dégagée, parcelles isolées). Les secteurs avec peu de cultures de maïs ou de tournesol sont plus à risque que les zones où les semis sont simultanés sur de larges surfaces (dilution de la pression). Les attaques sont possibles du semis au stade 5 feuilles (plante de 10 à 15 cm).
En termes de désherbage, les parcelles avec une flore dominante de graminées estivales et de ray-grass doivent être désherbées dès le semis, avec des produits à action racinaire. Les solutions de rattrapage foliaires sont limitées sur cette flore.
AC
Vigilance vis-à-vis de l’ambroisie !
« Surveillez vos parcelles de soja, tournesol, maïs. Les ambroisies lèvent. C'est le moment de faire le tour des parcelles pour y repérer les ambroisies ! », préconise Emeric Courbet. Les plantules d’ambroisie sont facilement repérables dans les cultures de printemps, même si un risque de confusion existe avec les plantules de chanvre d’eau. Une prospection à pied autour de la parcelle reste néanmoins nécessaire pour repérer efficacement cette plante invasive. Est-il encore nécessaire de présenter cette plante pionnière, très concurrentielle des cultures de maïs, soja, tournesol… et dont le pollen est fortement allergisant ? « En cas de découverte d'un foyer, il est important de l'arracher immédiatement avant la floraison et dissémination des graines, poursuit le technicien : dans les parcelles infestées, on peut quasiment faire une croix sur les cultures de printemps. Il ne faut donc pas se laisser déborder ! » Rappelons que la production de graines est importante et que leur durée de vie dans le sol est élevée. La plante est capable de redémarrer même après un broyage ou un binage… Pour coordonner la lutte contre l’ambroisie, il existe quatre modes de signalement.
Par courriel à : [email protected], par téléphone au : 0 972 376 888, sur le site internet : https://www.signalement-ambroisie.fr/ et via l’application mobile Signalement Ambroisie.