Protéines locales
Contractualiser : une marche de plus vers la structuration pour Profilait

Depuis 2019 et son lancement, la démarche Profilait, destinée à structurer une filière régionale de production et de transformation de protéines à destination de l'alimentation animale, connaît une montée en puissance progressive. Le point d'étape organisé le 9 juin à Longvic, près de Dijon, marque un tournant avec l'annonce d'une démarche contractuelle expérimentale.

Contractualiser : une marche  de plus vers la structuration  pour Profilait
Sylvain Marmier (à gauche) pour la Chambre régionale d'agriculture et Lionel Borey, président de l'Alliance BFC, ont salué le travail accompli sur le projet Profilait.

Lorsqu'on commence à parler « contractualisation », on peut considérer qu'une démarche telle que Profilait a quitté le terrain de l'exploratoire pour pénétrer dans celui du concret. Lancée en 2019 et, pour l'instant, circonscrite à l'élevage laitier, Profilait ambitionne de créer et de structurer une véritable filière Bourgogne-Franche-Comté (BFC) de production, de transformation et de distribution de protéines à destination de l'alimentation animale. Une démarche longue et complexe, qui réclame de fédérer un grand nombre d'acteurs mais qui aurait la grande vertu de réduire la dépendance d'une bonne partie des élevage régionaux à des aliments d'importation. Ces acteurs, ils étaient réunis le 9 juin au siège de l'Alliance BFC (regroupement des coopératives Dijon Céréales, Terre Comtoise et Bourgogne du Sud) à Longvic, près de Dijon, afin de procéder à un point d'étape sur l'avancée globale du projet. Et de contractualisation, il en fut beaucoup question. A cette occasion a été annoncée le lancement, cette année, d'une expérimentation prévue pour durer trois ans et destinée à comprendre comment pourrait fonctionner un système de contrats liant des producteurs locaux de soja et des producteurs laitiers.

Un schéma à trois étages

Ce qui ressortirait de ces trois années permettrait de valider certains choix, ou, au contraire, d'en abandonner d'autres, jugés irréalistes ou peu performants. Mais cette contractualisation expérimentale (nous l'avions déjà évoquée dans Terres de Bourgogne du 26 mai N°1733). L'objectif est de fédérer une centaine d'éleveurs laitiers et une cinquantaine de producteurs de soja dans cette expérimentation. Le schéma contractuel proposé s'organisera entre une charte Profilait rappelant les grands principes et signées par les acteurs concernés, un contrat cadre signé par la Chambre régionale d'agriculture, la FRSEA, les JA BFC et la coopération agricole BFC, puis des contrats d'application conclus entre chaque acteurs : éleveurs, céréaliers, organismes stockeurs (OS), fabricants d'aliments, distributeurs. Ces derniers contrats seraient d'une durée de trois ans (voir encadré). « Nous sommes demandeurs d'un maximum d'acteurs régionaux pour participer aux réunions de préparation de la mise en œuvre de cette expérimentation » insistait Marc Grangeot, directeur Terrain chez Dijon Céréales. Il faudra aussi parvenir à stabiliser la production régionale de Soja qui se caractérise, comme le rappelait Mathilde Schryve, analyste à Cerfrance BFC, par des variations en rendements qui constituent autant d'insécurité pour les transformateurs. A titre d'exemple, depuis 2016 les baisses de rendements moyens constatées sur le soja régional ont pu atteindre -36 % quand elles se limitaient à-4 % pour le blé... Cela laisse certes planer quelques incertitudes mais, aux yeux de Marc Grangeot « il est impératif de, malgré tout, lancer une dynamique de filière afin de gagner en crédibilité lorsqu'on va ensuite frapper à la porte des industriels » et ce projet de contractualisation s'inscrit incontestablement dans ce cadre.

Projet utile à plusieurs titres

L'intérêt d'un projet comme Profilait, c'est aussi qu'il ouvre des perspectives car il apparaît évident qu'on ne s'en tiendra ni à l'élevage laitier, ni à la production de soja. Mais il faut bien commencer quelque part ! C'était l'avis du Côte-d'Orien Jacques de Loisy, président du Comité régional des céréales pour qui, après le soja, il faudra se pencher sur les pois ou la luzerne « mais, ajoutait-il, il nous faudra aussi des retenues d'eau pour cela ». A terme, il faudra aussi développer une stratégie à destination des consommateurs afin de mettre en lumière le travail réalisé par l'écosystème agricole. Florent Point, président des JA BFC le rejoignait en reconnaissant que « dans le contexte du nécessaire renouvellement des générations, des projets comme Profilait sont nécessaires pour sécuriser le revenu, l'installation, l'exploitation. Il y a des filières capables de se mobiliser autour de projets communs ». Au chapitre des réactions, le Jurassien Mathias Bouillet, également président de la Fédération régionale des coopératives laitières du Massif jurassien (FRCLMF) voyait dans l'avancée de Profilait « une forme de pari pour notre territoire qui doit être plus accompagné par la Région et qui est cohérent avec le travail mené par la Chambre régionale d'agriculture pour tenter de définir ce que sera l'agriculture régionale de 2040 ». Quant à Sylvain Marmier, du Doubs et élu à la Chambre régionale, il rappelait que si, à court terme, un projet comme Profilait nécessite des investissements et coûte donc de l'argent « ces coûts, il faut les appréhender pour voir comment on les intègre à nos fonctionnements. On ne sait pas ce que donnera Profilait demain mais si on ne prends pas en compte nos fonctionnements futurs, ce sera dur. Nous sommes là pour tenter de définir un chemin, ce qui est important pour rassurer les agriculteurs. Nous devons avoir la capacité de faire une offre qui réponde à des enjeux qui nous font face. Il faudra capitaliser sur les gens qui ont envie de s'impliquer ». Le travail réalisé ces douze derniers mois a en tout cas été unanimement salué : « pour les opérationnels, concluait Christophe Richardot, directeur général d'Alliance BFC, il est important d'entendre les élus se positionner positivement sur Profilait ».

 

Berty Robert