Chambre d'agriculture du Jura
Tour d'horizon sur la sécheresse

La session de la chambre d'agriculture du Jura a fait un large tour d'horizon sur la situation préoccupante liée à la sécheresse.
Tour d'horizon sur la sécheresse

Cette dernière session de mandature aurait pu sacrifier au traditionnel bilan des actions menées par ses élus. Il n'en a pas été ainsi. Le thème de cette assemblée, réunie le 21 novembre à Lons-le-Saunier, a été consacré au sujet des calamités agricoles et forestières 2018. Le préfet a tenu à être présent lors de ces échanges malgré le devoir de réserve en période pré-électorale et les manifestations des gilets jaunes qui ont bloqué la DDT durant une partie de la matinée.

François Roze, directeur adjoint de la chambre régionale d'agriculture Bourgogne Franche-Comté a illustré les tendances du réchauffement de données chiffrées. Outre la hausse des températures qui font de 2018 le deuxième été le plus chaud en France depuis 1959, la situation préoccupante vient de l'absence de pluviométrie. La station météo de Lons-le-Saunier relève entre 50 et 78% de déficit de précipitation mensuel sur la période de juin à octobre. « On note un effet cumulatif et l'accentuation d'une crise qui perdure dans le temps. La sécheresse exceptionnelle des sols a un impact sur les cultures et occasionne des déficits de rendements fourragers de l'ordre de 75% dans l'Est de la France. Comme toujours, une hétérogénité peut exister au niveau local sur des micro-territoires qui ont pu recevoir des précipitations », relève François Roze.
Jacques Louis, représentant de la forêt privée, ne cache pas son inquiétude. « La filière bois est affectée par la sécheresse dans son ensemble. La sylviculture est une culture a très long terme, nous devrons avoir une réflexion sur la capacité de résilience des arbres, peut-être adapter les essences... »
La faune sauvage a également souffert de la sécheresse. L'impact se ressent au niveau de la recrudescence de dégâts de gibiers, notamment sur prairies.
Seul Nicolas Caire, président de la société de viticulture du Jura, affiche un visage serein tout en se faisant solidaire des difficultés rencontrées par les agriculteurs. « Cette année, rendements et qualité sont au rendez-vous pour les viticulteurs. Après plusieurs années de mauvaises récoltes, les stocks vont pouvoir commencer à se reconstituer et c'est un souffle d'air pour les jeunes installés.»

 

Comment s'adapter ?

 

Les scénarios scientifiques les plus pessimistes prévoient un réchauffement climatiques mondial de 1 à 2 degrés par dizaine d'années avec un accroissement des événements climatiques critiques.
Pour les agriculteurs du Jura, la plage de températures et de précipitations, dans la majorité des années, permettra une production et des rendements normaux mais certaines années les sortiront de cette « zone de confort ».
L'agriculteur ne pouvant jouer ni sur la fréquence des aléas, ni sur leur sévérité, c'est sur la capacité de résistance et d'atténuation des systèmes qu'il est nécessaire d'agir.
Pour les productions fourragères, il s'agira par exemple de profiter de la pousse en début de printemps et d'avancer la mise à l'herbe , ou de stocker du fourrage pour l'été comme pour l'hiver (un an de stockage). En céréales à pailles, il pourrait s'agir de sélectionner des variétés à épiaison ou montaison précoce, ou de privilégier les mélanges variétaux ou d'espèces.
Sans oublier la prévention, avec le système assurantiel. L'évolution du climat nécessite aussi de se poser la question stockage de l'eau. Autant de sujets évoqués durant cette session. Il fut aussi rappelé les différents outils de conseils développés par la chambre d'agriculture pour accompagner l'adaptation des exploitations agricoles au changement climatique : des simulations climatiques jusqu'en 2050 par communes grâce à l'outil ClimA-XXI, la gestion de l'eau, le stockage des fourrages collectif, les bâtiments photovoltaïques, ou encore intégrer la dimension climatique dans les projets Agrilean et dans les formations sur le coût de production, des conseils sur les litières alternatives et le maintien des haies pour l'ombre, le travail du sol, les couverts végétaux, la culture de protéagineux, les diagnostics et bilans fourragers dans un contexte contraint,etc.

 

Un dispositif de soutien

 

Très tôt, les services de l'Etat, la région et le conseil départemental ont été sollicité par la profession pour soutenir les agriculteurs touchés par la sécheresse. Dominique Chalumeaux et les représentants des syndicats ont salué publiquement cette mobilisation des différents échelons des services publiques et des collectivités.
Christophe Buchet, président de la FDSEA, rappelle les mesures obtenues, « revendiquées et travaillées par la FDSEA et les JA » : la demande d'éxonération de la TFNB, la demande de reconnaissance calamités agricoles, les aides cofinancées par la région et les départements avec notamment une aide directe à l'UGB et une enveloppe destinée à la construction de bâtiments de stockage, et enfin la prise en charge exceptionnelle des cotisations MSA pour les JA ainsi que la demande de versement anticipé des aides PAC.
Il exprime enfin deux demandes en direction du préfet : veiller à la prise en compte des pertes sur les pâturages dans le Jura au titre des calamités agricoles et ouvrir la possibilité réglementaire aux communautés de communes qui le souhaitent d'intégrer le dispositif de soutien direct aux agriculteurs mis en place par la région et le département.

 

Vote du budget 2019

 

Dans son discours de clôture, Dominique Chalumeaux a insisté sur l'importance de pouvoir répondre aux enjeux du territoire (utilisation du foncier, alimentation de proximité), sans oublier l'installation/transmission et l'effort sur la réduction des produits phytosanitaires, autant de sujets sur lesquels la chambre d'agriculture est de plus en plus attendue et sollicitée.
« L'excès de consommation foncière pénalise nos productions agricoles et nos filières. Nous sommes étonnés d'une prise de conscience insuffisantes dans ce domaine. Nous devrons exprimer notre point de vue lors des consultations sur les PLUI, notamment concernant la zone de Rochefort-sur-Nenon et d'Innovia », prévient le président de la chambre d'agriculture.
Au cours de cette matinée de travail, l'assemblée consulaire a également eu à se prononcer sur une motion présentée par Elise Grossiord pour la Confédération paysanne concernant le soutien à l' « elevage paysan », « où le bien-être animal est une réalité », et s'élevant contre certains mouvements vegans qui mettent en péril l'activité d'élevage. Motion adoptée par une voix « pour » et sur laquelle le reste de l'assemblée s'est abstenue, préférant parler de « soutien à l'élevage en général ».
Enfin l'assemblée a appouvé les tarifs 2019 des services payants proposés aux agriculteurs dont la hausse est contenue à +1% , soit moins que l'inflation, « pour tenir compte du contexte difficile actuel pour les exploitations », indique le président Chalumeaux. Le budget initial 2019, présenté avec un résultat déficitaire de – 159 000 euros, a été adopté par 25 voix « pour » et une abstention. Ce résultat est lié notamment aux charges liées à la mise en place de la chambre régionale mais surlesquels les élus peuvent espèrer un retour positif par la suite. « Le fond de roulement de la chambre du Jura reste bon», tient à rassurer le président.
Il reviendra à la nouvelle équipe élue en janvier prochain de choisir les orientations à donner pour les 5 années à venir.

 

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