Écleux sous le choc : tous les troupeaux abattus
En trois jours, la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) a touché les trois élevages bovins du village d’Écleux, dans le Val d’Amour. Chaque exploitation a dû être dépeuplée dans l’urgence. Un drame pour les familles concernées et au-delà pour tout l’élevage jurassien.

Dimanche matin, le calme habituel d’Écleux a brusquement volé en éclats. Plusieurs dizaines de gendarmes postés aux entrées du village et un hélicoptère survolant le secteur ont rapidement attiré l’attention des habitants. La préfecture a confirmé dans la journée la cause de cette agitation : un foyer de dermatose nodulaire contagieuse venait d’être confirmé sur une exploitation laitière de la commune. Immédiatement, les autorités sanitaires ont activé une nouvelle zone réglementée de 50 Km autour d’Ecleux, à cheval sur cinq départements (Jura, Doubs, Haute-Saône, Côte-d’Or et Saône-et-Loire) entraînant une interdiction de déplacement des animaux et l’obligation de les vacciner. La quasi-totalité de notre département est désormais en zone réglementée.
Depuis, les mauvaises nouvelles se sont enchaînées. Lundi soir, des cas positifs ont été confirmés dans un second élevage du village. Et mardi, on apprenait que la troisième exploitation de la commune était également concernée.
« Tout est allé très vite, de façon exponentielle », explique Anne-Cécile Cotillon, directrice de la DDETSPP du Jura. « Le premier jour, une bête était malade, avait de la fièvre, quelques nodules et ne mangeait plus, le deuxième, il y en avait cinq, puis quinze le troisième. Le virus se propage par des insectes piqueurs mais aussi par contact : les animaux larmoient, ont les yeux qui coulent. Ils transmettent la maladie en étant côte à côte ou en se léchant ».
Solidarité
La détection d’un cas de DNC entraîne l’abattage systématique du troupeau. Depuis lundi, une atmosphère lourde pèse sur Ecleux, au rythme des allers retours des vétérinaires chargés d’euthanasier les trois troupeaux (environ 240 vaches) et des camions d’équarrissage.
Pour les éleveurs, c’est un véritable coup de massue ! « Ils ont le sentiment que tout s’effondre, un mélange de fatalisme, de tristesse et de colère », explique Etienne Rougeaux, maire d’Ecleux par ailleurs directeur de la FDSEA du Jura. « Ils ont besoin de comprendre pourquoi à Ecleux alors qu’il n’y a pas eu d’achat d’animaux récemment et très peu de mouvement ». Pour les soutenir, eux et leurs familles dans ce moment difficile, un accompagnement médico-psychologique a été mis en place. « Nous sommes un petit village ou tout le monde se connaît et se serre les coudes » poursuit le premier édile. Pour preuve, des banderoles « Soutien à nos éleveurs » ont été accrochées dès le mardi sur plusieurs habitations du village.

En bref
La coopérative du Val d’Amour impactée
Au moins deux des trois exploitations touchées par la DNC à Écleux livraient leur lait à la coopérative du Val d’Amour. Christophe Buchet, président de la Chambre d’agriculture du Jura, a évoqué les conséquences immédiates pour la structure :
« Si on fait le cumul des deux exploitations, ça fait environ 700 000 litres de lait à l’année. Ce n’est pas une grosse coop, c’est une dizaine de sociétaires. 700 000 litres, ça va se ressentir. »
Aucune mesure spécifique n’est prévue à ce stade pour les outils de transformation, mais le président de la Chambre a insisté sur la nécessité de rester vigilants afin que l’activité économique locale puisse se maintenir : « Le but, c’est qu’on ait des outils économiques qui continuent de tourner. On sait qu’une coopérative a fermé en Savoie sur les premiers foyers. C’est quelque chose sur lequel on est forcément attentifs. »
Des enquêtes épidémiologiques pour comprendre
À Écleux, les services de l’État et les vétérinaires tentent désormais de comprendre comment le virus est arrivé dans cette commune jusque-là épargnée. Lors de la conférence de presse, plusieurs intervenants ont souligné que les exploitations touchées n’avaient pas introduit d’animaux depuis plusieurs années. Les enquêtes épidémiologiques sont menées sur le modèle d’une « enquête de police », selon les mots employés par les autorités. Elles visent à retracer tous les contacts possibles entre animaux, personnes ou véhicules, et à déterminer le vecteur d’introduction du virus.
« On voit qu’il y a des exploitations proches des zones d’infection qui ne sont pas touchées, et d’autres très éloignées qui le sont. À ce stade, on ne peut pas encore expliquer pourquoi », a expliqué le préfet du Jura.
La collecte d’effluent d’élevage annulée
Suite à ce nouveau foyer de DNC, la chambre d'agriculture du Jura a dû annuler la collecte d'effluents d'élevage prévu pour faire face aux demandes d'analyse en lien avec l'arrivée du nouveau cahier des charges du comté. Elle devait avoir lieu les 21 octobre à Foucherans et le 22 à Lons-le-Saunier.
Un nouveau foyer dans l’Ain
Mardi 14 octobre, un nouveau cas de DNC a été confirmé dans un élevage de 180 veaux à Neuville-les-Dames, dans l’Ain. L’animal infecté provenait d’une exploitation d’Ecleux et avait été vendu avant l’apparition des symptômes et des premières suspicions de foyer. Une nouvelle zone réglementée (la ZR5) a été instaurée. Par précaution, le marché aux bestiaux de la Chambière, situé à Saint-Denis-lès-Bourg, aux portes de Bourg-en-Bresse devrait fermer pendant plusieurs semaines, au moins 45 jours.
83 foyers confirmés en France dans 51 élevages différents (au 14/10/2025 )
- 32 en Savoie sur les communes d'Entrelacs, La Biolle, Hauteluce et Chindrieux
- 44 en Haute-Savoie sur les communes de Rumilly, Massingy, Marigny-Saint-Marcel, Faverges Seythenex, Saint Ferréol, Boussy et Moye
- 3 dans l'Ain à Culoz, Injoux et Neuville les Dames
- 1 dans le Rhône à Saint-Laurent-de-Chamousset
- 3 dans le Jura à Ecleux
Plusieurs foyers ont été confirmés en Espagne (Catalogne). Les mesures mises en place et notamment l’instauration de zones réglementées impactent plusieurs communes de la région Occitanie (création d’une ZR3).