Sanitaire
Lutte contre la BVD : le Jura exemplaire

L’assemblée générale du GDS du Jura s’est tenue vendredi 9 décembre à Hauteroche avec pour thème central l’éradication de la BVD, maladie contre laquelle le Jura fait figure de précurseur. Ce fut aussi l’occasion pour le GDS de faire un point sur deux autres pathologies : l’IBR et la besnoitiose. Si BVD et IBR reculent dans le département, la besnoitiose gagne du terrain.

Lutte contre la BVD : le Jura exemplaire

Le dépistage et l’assainissement de la BVD sont obligatoires dans tous les élevages bovins du territoire français, depuis la parution de l’arrêté ministériel du 31 juillet 2019. Dans cette lutte contre la maladie, le Jura était précurseur en lançant, sous l’impulsion du GDS, une campagne de dépistage de la BVD, d’abord de manière volontaire depuis 2012 puis généralisée dès 2017. Aujourd’hui, la totalité des naissances sont contrôlées et depuis le 1er août 2022, plus aucun passeport ni Asda ne sont délivrés sans analyse, mesures bien acceptées par les éleveurs. Grâce à cette prise de conscience précoce, la maladie recule plus vite dans le Jura qu’ailleurs.

Carole Sala, vétérinaire à GDS France et Franck Morel, directeur du GDS Jura ont conjointement présenté les situations française et jurassienne.  Il ne reste aujourd’hui que 13 cheptels jurassiens de « statut infecté » contre 34 l’année précédente. La circulation du virus a en effet fortement baissé. Sur la dernière campagne, seulement 0,1 % des veaux dépistés dans le Jura étaient viropositifs (contre 0,2 % l’année précédente). En comparaison, au niveau national, ce taux était d’environ 0,4 %. « Le Jura est une chance pour les autres départements, » estime Carole Sala. « Vous servez d'exemple car vous vous êtes posé les bonnes questions ». 

Petit bémol, s’il y a moins de cheptels touchés, ceux qui le sont ont plus d’animaux positifs. Pour un élevage infecté, les coûts engendrés (frais vétérinaires, pertes production,) peuvent être très importants et sont en général évalués entre 46 et 83 € par bovin et par an.  « Cela m’a coûté plus de 10 000 € en tout, » a témoigné un éleveur infecté il y a environ 3 ans.

Faire moins cher mais aussi efficace

Pour réduire le coût de la lutte contre cette maladie tout en maintenant un niveau de vigilance identique, le GDS du Jura met en place, début 2023, une surveillance sérologique sur le lait pour les élevages laitiers. Les veaux de multipares issus d'élevages disposant d’un statut sérologique « favorable » seront qualifiés non IPI sans avoir besoin d’être analysés individuellement. Ce protocole sera appliqué d’ici quelques semaines dans une cinquantaine d'élevages se trouvant dans un contexte épidémiologique favorable. Ce panel sera élargi, courant 2023, à d’autres cheptels pour lesquels les analyses de lait de tank sont séronégatives.

Durant cette AG, vétérinaires, éleveurs et négociants ont partagé leurs expériences sur la BVD

Pour les élevages allaitants, ce suivi du statut sérologique du troupeau reste très difficile à mettre en œuvre. Toujours dans l’optique de réduire les coûts, le GDS étudie la possibilité de passer les mélanges analysés de 10 à 25 biopsies. 

« L'effort collectif a payé, » est intervenu Christophe Buchet, vice-président de la chambre d’Agriculture et président de la FDSEA du Jura. « Mais il va falloir continuer alors que nous pensions que l’étau allait se desserrer ». Pour Rémy Guillot, président du GDS, la pression ne se relâchera vraiment que quand toute la France sera déclarée indemne : « La lutte contre la maladie avance vite, mais a tendance à ralentir. Les queues d'éradication sont toujours difficiles ».

Vigilance et biosécurité

Plusieurs conseils de vigilance ont été donnés aux éleveurs, notamment lors de l'achat de génisses pleines : même si l'animal est qualifié non IPI, il peut donner naissance à un veau qui l’est. Lorsque c’est possible, les veaux doivent donc être isolés tant que les analyses n'ont pas été réalisées. Il faut aussi être très attentif lors des retours de rassemblement, d'estives, de pension ou de pâturage collectif.

Une étude des autorités sanitaires belges a démontré que les intervenants en élevage pouvaient aussi jouer un rôle dans la propagation de la BVD. Pour réduire le risque, il est conseillé d’installer des pédiluves à l’entrée des fermes, solution peu onéreuse et efficace.

IBR en voie d’éradication

Autre maladie en voie d’éradication dans le département : l’IBR. La campagne 2021-2022 a été marquée par le déploiement de la loi de santé animale et ses conséquences sur la prophylaxie et les règles aux mouvements. La réglementation s'est allégée pour les cheptels indemnes qui voient le nombre d'analyses à réaliser diminuer, mais se durcit pour les autres. Le but est que la France dispose d’un statut indemne en 2027. Pour cela, il faut que 99,8% des cheptels français soient qualifiés indemnes. Le Jura est en bonne voie d'y parvenir avec 99,4% de cheptels indemnes contre 95,5% en bourgogne Franche-Comté et 93,7 % pour l'ensemble de la France.

« Nous sommes les garde-fous sanitaires d’un département en bonne santé », a déclaré Remy Guillot, président du GDS 39

Au 1er décembre 2022, il reste moins de 10 bovins « positifs IBR » dans notre département.  « Notre objectif est d’avoir aucun positif dans quelques mois et c'est atteignable », a précisé le directeur du GDS.  A titre indicatif, le nombre de bovins positifs à l’échelon régional est d’environ 8700. La vigilance reste donc de mise au niveau des mouvements.

Besnoitiose : prévenir au lieu de guérir

La besnoitiose bovine est une maladie originaire de l'Europe du Sud. Malheureusement, depuis quelques années, elle se propage rapidement sur l'ensemble du territoire national. Le GDS du Jura a mis en place depuis 2021 une campagne de dépistage et d'assainissement après l'apparition des premiers cas cliniques dans le département afin de freiner sa progression. « Son éradication sera compliquée car cette maladie n'est pas réglementée, » précise Franck Morel. « Heureusement dans le Jura, les éleveurs sont plutôt volontaires et dans l’ensemble cherchent à protéger leurs bovins. Néanmoins, la maladie est en progression et c’est ce que nous voulons éviter ».

En 2021, 876 analyses sérologiques sur lait de grand mélange ont été effectués. 14 soit 1,6% ont été positives. Un chiffre en augmentation car en 2022 il est monté à 5,8% (53 analyses positives sur 908 réalisés). Ces résultats doivent néanmoins être interprétés avec prudence notamment lorsqu’ils sont proches du seuil de positivité.

Risque accru pour les animaux originaires du sud

La besnoitiose se transmet par les insectes piqueurs, sur de faibles distances. Pour les éleveurs du Jura, le principal risque de contamination reste les introductions. « Nous avons mis en place des contrôles volontaires pour la détecter et prenons en charge 50% du coût d’analyse. Si l’éleveur ne veut pas contrôler toutes ses introductions, Il peut néanmoins cibler en fonction de l’origine des animaux, » conseille le directeur du GDS. « Dans certaines régions (notamment Occitanie) la maladie est endémique donc la probabilité d’introduire un bovin positif plus élevée. A titre d’exemple, sur 4 vaches venant de l’Ariège, 2 étaient positives ». Une fois un cheptel contaminé, la maladie peut se propager très rapidement. Dans un troupeau jurassien atteint, 20 % des animaux étaient infectés et ont dû être réformés.

« Le Jura est une chance pour les autres départements, » estime Carole Sala, vétérinaires à GDS France. « Vous servez d'exemple car vous vous êtes posé les bonnes questions »

Nouveauté cette année : les analyses besnoitioses sont systématiquement demandées sur les concours du département. « Les comices ont très bien réagi à cette demande de dépistage, » confie Rémy Guillot.

« La nature a horreur du vide »

Association qui regroupe plus de 98% des éleveurs du département, le GDS leur reverse l’essentiel des subventions touchées pour le suivi sanitaire des troupeaux. Cette année, 78% de ces aides concernaient la BVD et 9,4% l’IBR. Ces montants sont amenés à baisser car ces maladies sont de moins en moins présentes sur le département. Les aides pour la besnoitiose devraient à l’inverse augmenter. « La nature a horreur du vide, » réagit le président du GDS. 

Salmonelles et méthaniseurs

Parmi ses autres missions, le GDS, par le biais de sa cellule de prévention « bien-être animal », a mené en 2022 trois opérations pour capturer des bovins en fuite, dont certains étaient dans les bois depuis 18 mois.

Pour l’année qui vient, le GDS du Jura a signé une convention avec la DDETSPP afin d’accroitre la sécurité sanitaire dans les méthaniseurs. Les élevages y introduisent des effluents potentiellement contaminés par des salmonelles qui peuvent se retrouver à la sortie dans les digestats épandus sur les exploitations. Les conséquences pour les filières fromagères au lait cru peuvent alors être très importantes.

S.C.

« Notre objectif est d’avoir aucun positif dans quelques mois et c'est atteignable », a précisé Franck Morel, directeur du GDS.